MR :  » Nous ne sommes pas le parti des riches « 

La crise offre au PS des munitions inattendues pour tirer sur le modèle libéral. Chez les militants du MR, on ne cède pas à la panique. Mais on s’attend à une compagne électorale qui sera tout, sauf facile.

Branle-bas de combat. Tous les parlementaires MR viennent de recevoir un e-mail compilant quatre cartes blanches sur la crise financière. Objectif :  » Contrer les argumentaires opportunistes qui tentent de faire l’amalgame entre libéralisme et capitalisme à de pures fins électoralistes.  » Le MR a même créé une sorte de cellule de crise : deux collaborateurs se relaient, presque 24 heures sur 24, pour répondre à l’avalanche de courrier et d’appels téléphoniques – parfois inquiets, parfois furax – qui parviennent au siège du parti. Récemment, lors d’une réunion interne portant sur le commerce équitable, un conseiller de la ministre Laruelle s’est par ailleurs exclamé :  » Le MR ne doit pas être le bras armé de la FEB !  » Des propos qui trahissent une nervosité évidente.

A sept mois des élections régionales, les sondages ne sont pas bons : début octobre, le baromètre de La Libre Belgique créditait le MR de 27,1 % des voix en Wallonie (pour 31,2 % en juin 2007). Un sérieux avertissement, au moment où la crise permet au PS d’entonner les bons vieux couplets sur  » l’argent-roi « ,  » l’économie-casino  » et  » l’arrogance des puissants « . Dans le Hainaut, en particulier, les socialistes espèrent opérer un retour en force : en temps de crise, le citoyen renonce aux audaces, se tourne vers les valeurs-refuges, c’est-à-dire le PS, parti de toujours.

 » Notre cher camarade Di Rupo essaie de faire porter le chapeau de cette crise au libéralisme, pour perturber le citoyen wallon. La campagne risque d’être rude « , s’inquiète Bernard Dupriez, président de la section MR de Saint-Ghislain, dans le Borinage.  » Les socialistes vont taper sur le clou constamment. Ils n’arrêteront pas de rappeler que le libéralisme entraîne la précarité « , pronostique un militant.  » C’est de bonne guerre, reconnaît Frédéric Maghe, collaborateur parlementaire, originaire de Binche. Au MR, nous avons un peu utilisé les scandales à Charleroi, en ne ratant jamais une occasion de revenir sur le sujet. Mais la différence, c’est qu’à Charleroi le PS était directement impliqué, alors que ce n’est quand même pas Didier Reynders qui a provoqué la crise des subprimes !  »

Reynders, justement, s’en tient à une ligne claire : pas question pour l’Etat d’indemniser les actionnaires de Fortis.  » Aucun actionnaire n’est venu me trouver quand le Bel 20 était à 4 700 points pour me dire qu’il gagnait trop d’argent « , répondait-il sans faux-fuyant, le 24 octobre, dans L’Echo. Autre extrait de la même interview :  » Certains voudraient qu’outre la non-taxation des plus-values boursières, on puisse rembourser les moins-values. Il faut être sérieux.  » Faut-il y voir un recentrage du MR ? Peu probable. Le ministre des Finances ne pouvait guère tenir un autre discours que celui-là, quitte à déplaire à une partie de son électorat-cible, les petits actionnaires en l’occurrence.

Si de nombreux militants libéraux vouent une haine corse au PS, ils estiment injuste de payer pour les dérives d’un capitalisme sauvage qu’ils ne cautionnent pas.  » Ma section compte 70 membres : des fonctionnaires, des indépendants, des ouvriers… Franchement, ce n’est pas chez nous qu’on trouve les ultra-riches. Ceux-là, ils étaient dans l’ancien PSC « , se défend Bernard Dupriez.  » La faillite de Fortis, cela aurait représenté des milliers d’emplois perdus et un carnage social à la clé. Qui voulait ça ?  » interroge Jérôme Urbain (27 ans), jeune échevin MR à Binche.  » Je le vois dans mon entreprise : depuis quelques années, c’est la course au profit, poursuit Olivier Ma-lengreau, cadre au sein d’un grand groupe industriel, et habitant de Cuesmes. Le rythme de travail augmente sans cesse. Tout ça parce qu’une poignée de financiers veulent toujours plus de sous !  » Carnage social, course au profit : voilà qui ne ressemble pas au lexique traditionnel de la droite…

François Brabant

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