MIEUX QUE L’IPHONE 7, MON CHIEN !

David Abiker

Si on m’avait demandé de choisir, il y a quelques années, entre l’iPhone 7 en exclusivité et mon Cavalier King Charles, Charlie, j’aurais à n’en pas douter opté pour le mobile d’Apple, d’autant qu’il est plus facile d’avoir un téléphone quand on vit en appartement. Je pensais aussi que si je disposais d’un appareil dernier cri (avec la sonnerie qui aboie), j’aurais une meilleure estime de moi-même. J’ignorais à l’époque que Charlie avait les qualités d’un smartphone, et bien plus encore. Avec la maturité et l’expérience de la société d’abondance technologique, je peux dire aujourd’hui que j’ai trouvé chez cet animal ce que le monde moderne s’évertue à chercher dans les objets connectés : de la bienveillance, de la réactivité et de la très haute fidélité. De la sensibilité, aussi. Quand il sent que je ne vais pas bien, Charlie se colle à moi et ne bouge plus, alors que mon smartphone sonne quand je voudrais qu’il se taise.

Et la tendresse ? Bordel ! A vrai dire, mon chien n’a rien à envier à un téléphone mobile, un frigo intelligent ou une tablette dernier cri. Ainsi, quand je le caresse, Charlie s’anime et son regard me transmet des informations très nombreuses sur la tendresse qu’il me porte. N’est-ce pas ce qu’on attend d’un téléphone ? Des alertes qui nous donnent le sentiment d’être attendus, espérés, importants ? Lorsque je lui parle, mon Charlie réagit au doigt et à l’oeil, exactement comme Siri. Mieux que Siri puisqu’on sait désormais que les chiens reconnaissent non seulement le ton de la voix, mais aussi le mot qui va avec et font la différence entre l’un et l’autre. Siri oblige à articuler quand le chien comprend du premier coup le sens de  » Lâche la jambe du monsieur, lâche !  »

Je me souviens qu’avant le chien, lorsque je m’ennuyais, je me saisissais de mon téléphone. Aujourd’hui, il suffit que je siffle et Charlie me sort du vide existentiel dans lequel me plongent les réseaux sociaux. Mieux. Il y a deux ans, j’ai assisté à une réunion avec un chien guide d’aveugle. Il était juste là, sage, devant l’auditoire pendant que son maître parlait. Le chien change immédiatement le climat d’une conférence dédiée au cloud computing en un moment rare. En revanche, quand, dans une présentation geek, un robot est convié, il tombe en panne au moment de la démo et tout le monde se trouve gêné.

Rencontres au bois. Quelqu’un m’a dit qu’avec lui, on ne peut pas faire de selfies. Sans doute, mais le regard d’un chien sur son maître n’est-il pas plus valorisant que l’objectif d’un smartphone ? Mieux que ces machines, mon Charlie m’aide à communiquer avec les autres à travers l’immense réseau social des propriétaires de toutous. Je n’ai jamais autant salué mon prochain et sympathisé avec lui que depuis nos promenades au bois. Grâce à son air câlin, Charlie fait bien mieux que Meetic et séduit les jeunes femmes qui jettent sur lui (et sur moi par ricochet) un regard humide. Et lorsqu’elles le serrent sur leur poitrine, c’est un peu moi qui suis câliné. Enfin, quand Charlie renifle le derrière de leur chienne, il s’échange entre nous des non-dits bien plus équivoques et sensuels qu’un vulgaire sexto. Vous allez me dire :  » Mais les crottes à ramasser, quelle servitude !  » Certes, mais ne se baisse-t-on pas tout autant pour chercher des prises, des cordons, bref, n’est-on pas l’esclave de son téléphone quand on demeure le maître d’un chien ? J’ai compris combien je préférais passer du temps avec lui qu’avec mon mobile quand Charlie, cet été, a failli mourir d’un virus qui lui vidait les batteries et hâtait son obsolescence non programmée. Il était si maigre, si triste, que j’ai bien cru sa dernière sonnerie arrivée. Lorsque je l’ai emmené chez le vétérinaire, j’ai employé les mêmes mots que lorsque je vais chez mon réparateur agréé :  » Il a un truc qui ne va pas.  » Dans ces cas-là, le revendeur me propose d’en changer, d’acheter la version suivante. Et c’est toute la différence entre Charlie et le smartphone. Il n’y aura jamais qu’une seule et irremplaçable version du premier.

Chroniqueur pour 01net, le magazine de la high-tech

David Abiker

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