Michel Tabachnik, maestro à part

Barbara Witkowska Journaliste

Chef d’orchestre et directeur musical du Brussels Philharmonic, en résidence à Flagey, il guerroie pour l’intégration de la musique contemporaine dans les concerts traditionnels. Le public applaudit.

La saison démarre en fanfare. Michel Tabachnik enregistre deux nouveaux CD, très attendus ( La Symphonie du Nouveau Monde d’Antonin Dvorak, ainsi que La Mer et les Nocturnes de Claude Debussy), avant de diriger ses musiciens dans un copieux programme consacré à Mozart, Tchaïkovski, Ravel, Brahms, Strauss, Anton Bruckner et Luciano Berio. Les  » valeurs sûres  » du passé confrontées à des compositeurs les plus pointus du xxe siècle, donc. Ce programme éclectique confirme bien que la routine est étrangère à Michel Tabachnik.  » Nous ne sommes pas un musée, mais une plate-forme pour la musique vivante « , ne cesse-t-il de marteler.

Après des années fructueuses passées avec, notamment, l’Orchestre de la Fondation Gulbenkian à Lisbonne, l’Orchestre philharmonique de Lorraine et l’Ensemble InterContemporain à Paris, Michel Tabachnik, 68 ans, a été nommé, en 2008, à la tête d’une prestigieuse formation, le Brussels Philharmonic, et travaille à Flagey, dans le Studio 4, un des meilleurs au monde pour la qualité de son acoustique, ainsi qu’au palais des Beaux-Arts. L’orchestre, composé d’environ 85 musiciens, dont un tiers d’étrangers, se prête avec souplesse à l’exécution d’un répertoire extrêmement varié.  » Je connais bien Pierre Boulez, j’ai dirigé les premières mondiales de Iannis Xenakis, j’aime aussi Mahler et Brahms. Il n’y a pas beaucoup de chefs qui ont la volonté de jouer ces répertoires. « 

Né à Genève, Miche Tabachnik fréquente très tôt les répétitions d’Ernest Ansermet, chef de l’Orchestre de la Suisse romande, grand spécialiste de Stravinsky et chef d’orchestre attitré des Ballets russes.  » J’ai aimé la musique d’aujourd’hui tout de suite, car elle élargit le champ de nos émotions. Bach est le maître du divin et de la spiritualité, Beethoven explore les affres de la condition humaine, Brahms, en une seule phrase, synthétise tous les sentiments humains, Tchaïkovski, c’est la ferveur et la passion du c£ur. Stravinsky et Debussy ont prouvé que la nature pouvait, aussi, nous procurer des sensations et des émotions. C’était très nouveau ! Les compositeurs de la seconde moitié du xxe siècle ouvrent davantage nos possibilités de ressentir en mettant l’accent sur l’imaginaire que nous avons en nous « … Parcours sans faute : études de piano, de la composition et la direction d’orchestre au Conservatoire de Genève. A 23 ans, le voilà assistant de Pierre Boulez.  » J’ai toujours composé. J’aurais voulu continuer, mais Boulez m’a dit « il faut que tu diriges ». On ne devient pas chef d’orchestre, c’est un don.  » Son destin fut ainsi tracé. Aujourd’hui, Brussels Philharmonic est un immense défi. Très spécifique et très flexible, il commence à être très demandé : à Londres, à Amsterdam, à Salzbourg, à Vienne et à Paris où il est en résidence à la Cité de la musique. L’objectif : hisser l’orchestre au niveau mondial. L’accomplissement est en bonne voie.

BARBARA WITKOWSKA

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