Les auteurs dénoncent des revenus en diminution dans un marché de la BD embouteillé. © PIERRE DUFFOUR/Belgaimage

Marché sous tension

La bande dessinée reste le secteur le plus dynamique du marché du livre. Et pourtant ses créateurs s’appauvrissent un peu plus chaque jour.

Côté pile, celui des éditeurs et actionnaires, tout va très bien, madame la Marquise : le marché de la BD semble ne s’être jamais aussi bien porté ! Les chiffres définitifs de 2017 ont en effet de quoi leur donner le sourire : on a vendu en France et en un an 43 millions d’albums pour un chiffre d’affaires de 500 millions d’euros, soit une augmentation de 9 % par rapport à 2016 : du jamais-vu en dix ans, et des résultats qui jurent avec le reste du marché du livre, en contraction, lui, de 1,6 % ! Une tendance que tous espèrent voir se confirmer en 2018, même si le supertanker Astérix n’est plus là pour fausser tous les chiffres de l’année ; Astérix et la Transitalique s’est vendu l’année dernière à 1,5 million d’exemplaires à lui seul, loin devant le dernier Titeuf, deuxième meilleure vente de l’année mais très, très loin derrière, avec  » seulement  » 175 000 exemplaires. Tous les regards sont donc tournés vers le dernier Blake & Mortimer censée être la locomotive de 2018.

Mais personne n’est dupe, à commencer par les créateurs, dessinateurs et scénaristes de BD qui, eux, tirent la langue et le diable par la queue un peu plus chaque jour : selon l’étude menée par la toute fraîche Ligue des auteurs professionnels fondée en France pour défendre leurs intérêts, environ 50 % des créateurs dont la BD est le métier gagnent moins que le smic (en Belgique, le revenu d’intégration), et 36 % d’entre eux ont des revenus qui les placent sous le seuil de pauvreté ! Des revenus en perpétuelle diminution, qui s’expliquent en partie par… la bonne santé du secteur, qui publie de plus en plus d’albums (plus de 5 000 nouveautés à l’année), mais avec des tirages de plus en plus serrés, et de moins en moins sur le principe de la série. Résultat : avances et droits d’auteur fondent comme neige au soleil, et sont eux-mêmes remis en cause par les nouvelles dynamiques du marché, qui lorgne désormais franchement un modèle à l’américaine, sans royalties. La grogne est désormais à la mesure de ce paradoxe -la vitalité du secteur ne profite pas à ses créateurs- et pourrait, comme chaque année à l’approche d’Angoulême, dégénérer en un conflit social majeur.

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