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Mai 68 à Milan

Si on a beaucoup soupé du 50e anniversaire de Mai 68, il ne faut pas hésiter à se plonger dans ce gros roman qui évoque l’Italie de ces années-là avec beaucoup de justesse et de profondeur. Mais Deux sur deux, paru en 1989 dans la Botte et publié pour la première fois en français, est avant tout l’histoire d’une amitié singulière. Une amitié forte, compliquée et douloureuse aussi, entre deux adolescents d’un collège de Milan que l’on va suivre vingt ans durant.  » La première fois que j’ai vu Guido Laremi, nous étions tous les deux si maigres et si perplexes, si peu présents dans nos vies que nous les regardions en spectateurs.  »

En fait, le narrateur, Mario, est fasciné par ce camarade très différent des autres, à la fois ténébreux et charismatique,  » excentrique et romantique « , qui emballe les filles et suscite chez les garçons  » un mélange de jalousie et d’envie « . D’origine modeste, Guido pourfend avec rage la civilisation industrielle,  » à l’origine de presque toute l’horreur du monde « . Sous l’influence de son ami, Mario veut lui aussi rompre avec l’ordre établi, alors que les événements de 1968 en France, en Allemagne et ailleurs, leur apparaissent  » comme une perturbation météorologique de grande ampleur, qui arrivait jusqu’à nous, atténuée par la distance mais encore assez forte pour modifier le climat « .

Deux sur deux, par Andrea De Carlo, trad. de l'italien par Chantal Moiroud, HC éd., 414 p.
Deux sur deux, par Andrea De Carlo, trad. de l’italien par Chantal Moiroud, HC éd., 414 p.

L’occasion pour chacun de choisir enfin sa voie. Ce ne sera pas la même :  » Nous étions entraînés à la dérive par deux courants opposés « , réalise Mario, qui va faire sa vie à la campagne. Guido, lui, prend la tangente de Sydney à Londres, en passant par Rome, lesté d’un nihilisme croissant. Pas étonnant que cette ambitieuse saga initiatique et politique fasse figure de  » classique contemporain  » en Italie, où elle s’est écoulée à plus d’un million d’exemplaires. Auteur d’une vingtaine de romans, Andrea De Carlo, né en 1952, imprime à celui-ci autant de sobriété que de souffle.

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