Les vrais bienfaits des plantes

Complément indispensable de la médecine allopathique, la phytothérapie opère un retour en force… Boostée par la  » médecine des bourgeons « , ou gemmothérapie, et l’aromathérapie. Analyse d’une lame de fond et le top des dix meilleures plantes pour bien passer l’hiver et gérer son stress.

L’univers des plantes est fascinant : dans leurs feuilles, leurs racines et leurs fleurs, des centaines, voire des milliers de molécules interagissent. L’ensemble de principes actifs contenus dans une plante ou dans une partie de celle-ci porte le nom de  » totum « . Cette symphonie jouant la partition à l’unisson explique la difficulté à étudier les effets des plantes par des laboratoires des médicaments allopathiques.  » La médecine allopathique justifie les propriétés d’une plante d’après une molécule unique, isolée en particulier, extraite d’une plante ou synthétisée dans un laboratoire, décrypte Yves Vanopdenbosch, herboriste, fondateur de l’Ecole des plantes de Lessines (1) et auteur de La phytothérapie, aux éditions Amyris. On peut citer comme exemple la digitaline, extraite de la digitale (plante toxique) efficace pour les problèmes cardiaques ; la morphine, issue de l’opium du pavot, médicament contre la douleur, ou encore la quinine, extraite du quinquina, un arbuste originaire d’Amérique du Sud, et qui traite la malaria. La molécule unique présente un autre avantage qui consiste à mettre au point des médicaments avec un dosage précis, en utilisant autant de milligrammes d’une molécule donnée.  »

Un médicament allopathique utilise donc molécule par molécule par rapport à un effet. Il offre l’avantage de sa qualité et de sa stabilité. Hélas, les molécules  » miracles  » sont très rares. Dans les années 1950, une bonne équipe étudiait deux molécules par jour. Aujourd’hui, des machines hypersophistiquées en scannent 100 000 quotidiennement ! Le hic ? Le résultat est très limité car l’effet de ces molécules isolées est souvent nul. C’est la synergie entre les molécules qui justifie l’effet thérapeutique. Le meilleur exemple est fourni par le pavot de Californie, originaire d’Amérique du Nord, appelé aussi le starter du sommeil. Pris au coucher, en teinture-mère, il facilite l’endormissement. On a essayé d’isoler les molécules principales et testé leurs effets. Sans aucun résultat ! Autre bon exemple : l’artichaut. Outre son action sur le foie, sa feuille possède des propriétés diurétiques. Cependant, aucune molécule isolée n’arrive à produire cet effet. Il faut impérativement que l’ensemble des molécules soit réuni pour que cela fonctionne. Le pouvoir thérapeutique de cette synergie est supérieur à la somme des pouvoirs thérapeutiques de chacun des principes actifs.  » Dans une plante, il y a des centaines de molécules, poursuit Yves Vanopdenbosch. Certaines vont optimaliser l’effet de la molécule principale, d’autres vont temporiser les effets secondaires. Cela dit, l’inconvénient de la phytothérapie réside dans le fait que la teneur en principes actifs est variable selon les années, les saisons et les lieux. Par conséquent, on peut avoir un produit sous-dosé ou sur-dosé (toxique).  »

Bien connaître les plantes

La phytothérapie est excessivement complexe. Il ne faut pas l’idéaliser. Les plantes peuvent être toxiques et présenter, également, des effets indésirables. Le millepertuis, pour ne citer qu’un exemple, efficace contre la déprime, annule les effets de la pilule contraceptive et peut être photo-sensibilisant au soleil.  » Les patients sont de plus en plus informés et exigeants. Ils sont aussi de plus en plus nombreux à réclamer la phytothérapie, explique Nadejda Echikh, directrice des Espaces botaniques universitaires de Liège. Mais la phytothérapie, c’est l’art de connaître les plantes et la personne qu’on veut guérir. Elle réclame tout un savoir. Avant, il se transmettait. Aujourd’hui, il a disparu. C’est la raison pour laquelle nous avons lancé des formations sur les plantes, destinées au grand public (2). L’utilisation des plantes dans le domaine médical, pharmaceutique et alimentaire doit passer obligatoirement par la connaissance du règne végétal et la capacité de reconnaître les familles végétales.  » A la grande surprise de Nadejda Echikh, les premiers cours ont drainé non seulement un public considérable, mais attiré également des professionnels de la santé. On redécouvre donc que les plantes sont un complément indispensable de la médecine allopathique.

 » La médecine classique n’apporte pas toujours de solution aux patients et nous avons de plus en plus de demandes en phytothérapie « , précise de son côté le Dr. Bernard Dengis, médecin généraliste à Liège. A l’appui de ce constat, deux exemples concrets. Un jeune patient qui souffre d’une déprime passagère et demande une aide à son généraliste se voit le plus souvent proposer des anxiolytiques et/ou des sédatifs si son mal-être s’accompagne de troubles de sommeil. Or, ces médicaments de confort entraînent très vite l’accoutumance et la dépendance. A la place, on peut lui proposer des complexes à base de plantes, notamment la passiflore aux vertus anxiolytiques, sans effets secondaires chez un jeune patient ; un extrait de millepertuis qui donne un bon coup de fouet ainsi que le safran, extrait de crocus qui a agi efficacement sur l’état général de l’humeur. Le patient retrouve de l’énergie et de l’élan vital. Le safran régularise aussi le sommeil.

Le second exemple concerne les problèmes articulaires. Les anti-inflammatoires non-stéroïdiens sont très efficaces dans l’inflammation aiguë, mais peuvent être nocifs à long terme, dans la mesure où ils ne sont pas exempts de risques importants au niveau rénal, cardio-vasculaire et digestif (ulcère pouvant être hémorragique). De surcroît, leurs effets à long terme sur les cartilages restent controversés. Dans ce cas, les bonnes alternatives sont offertes par la curcumine (le curcuma) et l’arnica.  » Avant chaque prescription, il faut mettre en balance les risques et les bénéfices d’un traitement, poursuit le Dr. Dengis. Il ne faut pas céder à la facilité. En Belgique, on prescrit beaucoup trop d’anxiolytiques. Le patient demande aujourd’hui une alternative. Le recours à la phytothérapie est une démarche personnelle. Par curiosité intellectuelle, j’ai eu envie de savoir et de connaître ce que je prescris. La plupart des médecins ignorent que beaucoup de médicaments sont à base de substances végétales. J’ai répertorié quarante plantes qui ont été parfaitement étudiées et dont l’efficacité est précise et prouvée. Dans ma pratique, je fais appel à des médicaments contenant des plantes ainsi qu’à des extraits de plantes issues de la phytothérapie.  »

(1) www .ecoledesplantes.be

(2) www.espacesbotaniques.be/blog. Les cours ont lieu une fois par mois, de 13h30 à 15h30. Inscription obligatoire sur espaces.botaniques@ulg.ac.be

Par Barbara Witkowska

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