Les pinceaux à l’heure informatique

Guy Gilsoul Journaliste

Aux côtés des coloriages d’images (une tendance envahissante) existe un courant neuf qui, tout en étant très actuel, renoue avec les grandes traditions de la peinture.

Au départ de la grande histoire de la peinture occidentale, les artistes visent à rendre compte de ce qu’ils voient du monde extérieur, et, pour ce faire, mettent au point des moyens abstraits afin de donner l’illusion d’un paysage, d’un ciel, d’un vêtement ou d’un visage. Des glacis du xve siècle aux empâtements baroques, les techniques s’adaptent aux époques. Au xxe siècle, ce sont les parts invisibles de l’esprit qui préoccupent davantage les créateurs. Pour Kandinsky, par exemple, qui définit ainsi  » l’art pur « , il s’agit bel et bien de créer à partir du vide de la page blanche. Aujourd’hui, nombreux sont ceux qui pensent que le monde virtuel est devenu  » la  » réalité. Dès lors, l’artiste travaille autant avec l’ordinateur qu’avec les pinceaux. A l’aide du premier, il cherche d’abord dans la grande bibliothèque des images photographiques fortement médiatisées, celle qui retient son attention. Après quoi, via un traitement informatique, il reprend les pinceaux et, à son tour, emmène l’art de peindre vers de nouveaux chemins. Dans l’exposition d’Ixelles ( Pop-Up) qui propose un beau panorama de l’art belge d’aujourd’hui, ce type de peinture domine. Nous en retenons trois exemples.

1. STEPHAN BALLEUX. Le modèle prend une pose des plus académiques. Derrière le nu sans histoire, les murs sont nus, sauf un bouquet de fleurs posé au sol. Tout cela serait très banal si l’artiste ne se lançait un défi de vrai peintre en opposant le fond traité à la manière d’une photographie floue et la déformation virtuelle de la figure par une manière tout aussi patiente et distanciée. Tout un art. Le grincement en plus.

2. YVES LECOMTE. L’idée est simple et lumineuse. Puisque la peinture est, dit-on, miroir du réel mais que ce réel n’existe plus, le peintre peint l’envers d’un miroir brisé. Au premier regard, la forme abstraite domine. Mais les indications typographiées et les blessures du temps peintes avec la méticulosité des Flamands du xve siècle nous ramènent au concept. Ironie ? Sans aucun doute, comme chez Stéphane Balleux, le travail est épicé par le cynisme ambiant.

3. CINDY WRIGHT. Davantage liée aux manières de la peinture ancienne anversoise, cette jeune artiste renoue, via des thèmes liés aux  » Vanités « , avec cette forme de peinture qui, vue à une certaine distance, construit une image qui, au fur et à mesure que l’£il s’en approche, révèle les mille et une manières de créer l’illusion.

Pop-Up, Ixelles, musée communal, 71, rue Jean van Volsem. Jusqu’au 9 septembre. www.museedixelles.be

Les pinceaux à l’heure informatique

Guy Gilsoul

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