Les bons  » comtes  » du Bel 20

Xavier Attout

L’aristocratie belge et bruxelloise est bien représentée dans les sociétés du Bel 20 : 10 % des administrateurs en sont issus. Plus la société est ancienne, plus elle compte de nobles en ses rangs.

Tous les nobles ne sont bien évidemment pas issus de grandes familles. Annie Cordy ou Dirk Frimout peuvent en témoigner. Mais leur présence au sein de la plupart des entreprises du Bel 20 est toutefois un révélateur important de l’influence que peut avoir cette caste sur la vie économique. Et du gage de notoriété qu’elle peut apporter.

 » La lecture de la composition des conseils d’administration des plus grosses entreprises belges montre clairement l’omniprésence, et donc l’influence, de personnes et de familles nobles, d’un réseau nobiliaire aux ramifications relativement limitées, avec l’apparition d’une sorte de noyau dur financier s’attachant à perpétuer son patrimoine, son capital économique, culturel, social, voire symbolique « , estime Alain Finet, maître de conférence et chargé de cours à l’Université de Mons, auteur d’une étude sur la présence de la noblesse au sein des conseils d’administration et de leurs holdings faîtiers.

Au total, on trouve ainsi quatre chevaliers, douze barons et onze comtes au sein des organes de décision des sociétés du Bel 20. Soit 27 titres nobiliaires sur un total de 221 administrateurs. Ce qui représente plus du dixième des membres des conseils d’administration des sociétés composant l’indice phare d’Euronext Bruxelles. Un exemple : le conseil d’administration du holding Solvac, organe de décision du groupe Solvay, comprend quatre barons, quatre comtes et comtesses et un chevalier sur seize membres. Et certains administrateurs ne sont même pas repris comme nobles alors qu’ils le sont par alliance familiale.  » On voit clairement qu’il y a une stratégie de maintien de la puissance de la pseudo-aristocratie belge, notamment par sa mainmise sur les organes de contrôle des principales entreprises belges « , relève l’étude.

Garder la main sur les organes de décision

On y remarque également que plus la société est ancienne, plus elle comptera de nobles en son sein. Bekaert (deux barons, un comte), UCB (quatre barons, deux comtes) et Delhaize (un baron, trois comtes) peuvent en témoigner. Des résultats qui s’expliquent par le fait que les plus vieilles entreprises sont de type familial et pour lesquelles les fondateurs ont bien souvent été anoblis. Et même si le capital a été ouvert, la famille veut garder le contrôle sur les organes de décision. D’où ces fameux holdings faîtiers familiaux. Dans l’autre sens, Telenet, Colruyt et Omega Pharma ne comptent aucun noble dans leur conseil d’administration.

Sur la base de ces recherches, Alain Finet a classé les entreprises du Bel 20 en trois groupes : les industrielles, reliquats de la révolution industrielle (Solvay, Bekaert, UCB, AvH et AB InBev), les holdings de la mouvance Albert Frère (GBL, CNP) et les familiales plus récemment créées (Omega Pharma et Colruyt).

Au final, que conclure de cette présence nobiliaire ? Les auteurs relèvent qu’elle donne à certaines personnes une aura et un prestige octroyés sur la base de critères totalement obscurs.  » Nous avons pu ainsi constater que les familles les plus anciennes se dégagent progressivement des organes de gestion mais tendent à monopoliser les organes de surveillance. Elles se sont basées sur des stratégies matrimoniales particulièrement réussies pour asseoir leur capital économique et social. Pour les entreprises familiales plus récentes, l’implication dans la gestion opérationnelle est beaucoup plus importante.  »

Xavier Attout

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