Le Singe du Grand’Garde

Reconnaissez-vous l’animal ? Porte-bonheur des Montois, ce petit singe s’encastre dans le soubassement de l’hôtel de ville de Mons.

Appelé Singe du Grand’Garde (même si la bâtisse n’abrite plus de garde civique), il pose problème à de nombreux historiens désireux de percer son secret. Est-ce une fantaisie de l’architecte ? Une allégorie du caractère libre des Montois, malins et gouailleurs ? Le symbole d’un événement local ou un calembour visuel (singe-air-main pour Saint-Germain) ? Nombre de légendes et d’anecdotes circulent à son sujet… mais le mystère reste entier !

Serait-ce l’£uvre présentée par un apprenti forgeron lors de son entrée dans le métier ? Cette première hypothèse expliquerait que le petit singe, animal en vogue au Moyen Age, soit en fer forgé. Rappelons que différentes interprétations relient le singe au dieu Vulcain, dieu du Feu, de la Forge et de l’Artisanat. Une autre présomption laisse à penser que la statuette fut l’enseigne d’un débit de vin et de cervoises – voire d’un cabaret ! – situé dans les caves de la maison communale. Mais on imagine difficilement que ce petit quadrumane, timidement recroquevillé sur lui-même, ait pu attirer les foules… Pas vraiment aguicheur. Enfin, d’autres défendent l’idée que le singe servait de pilori pour enfants turbulents. Sous l’Ancien Régime, les parents pouvaient infliger une punition à leurs garnements en les exposant publiquement  » à la honte  » pendant quelques heures. Cette troisième supposition expliquerait qu’à Mons et dans le Borinage on ait longtemps menacé les petits rebelles en leur lançant :  » Si tu n’es nié sâche, ej’te mênerai au Sinche à Mons !  » Mais que cela ne vous donne pas des idées…

Quelle que soit son utilité initiale, l’animal est aujourd’hui le fétiche de la ville. Caresser le crâne de la main gauche – prérequis essentiel – vous apportera chance et bonheur. Toutefois, au risque d’en désenchanter quelques-uns, ce culte populaire fut inventé de toutes pièces – à des fins touristiques – par un juge montois, Paul Heupgen, en mars 1929. Même si le singe profitait déjà d’une certaine renommée, le magistrat publia un article dans La Province dans lequel il écrivait :  » Caressez le singe, cela porte bonheur. Oui, c’est ainsi qu’agissent tous les objets talismaniques depuis les dolmens druidiques jusqu’à l’orteil de saint Guignolet.  » Renforçant les assises de son récit, il édita des cartes postales : une jolie demoiselle y caressait la bête de fer. A en juger le lustre impeccable du crâne rasé, la mascotte semble bien tenir toutes ses promesses.

A l’instar du ‘t Serclaes bruxellois, les jeunes filles en quête d’un mari qui le caressent trouveraient époux dans l’année. On dit aussi que, pour un jeune couple qui se plie au geste rituel, c’est l’assurance d’un événement heureux dans l’année. Pour preuve, le prince Philippe et la princesse Mathilde avaient caressé ensemble la tête du singe en février 2000. Près d’un an plus tard, le couple annonçait l’arrivée de sa première-née. Avec pareil témoignage, vous voilà convaincus ?

Le Singe du Grand’Garde, hôtel de ville, 22, Grand-Place, 7000 Mons

La semaine prochaine : le Cheval Bayard

GWENNAëLLE GRIBAUMONT

une allégorie du caractère libre des Montois, malins et gouailleurs ?

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