Le pactole congolais

En volant au secours de son « frère » Laurent-Désiré Kabila, en août 1998, le président du Zimbabwe a joué une carte maîtresse pour assurer sa survie : il s’est rendu indispensable dans le cadre d’une résolution du conflit en République démocratique du Congo (RDC) tout en offrant à son entourage un accès aux immenses ressources du pays déchiré par la guerre. Car, si l’envoi de 12 000 soldats a coûté cher au Zimbabwe, aggravant l’impopularité du gouvernement, la guerre a été tout bénéfice pour les caciques du régime.

Tout comme le Rwanda et l’Ouganda, le Zimbabwe a été épinglé, en novembre dernier, par le panel d’experts que l’ONU a créé pour enquêter sur « l’exploitation illégale des ressources naturelles en RDC ». Deux Roddies (Blancs du Zimbabwe), Billy Rautenbach et John Bredenkamp, ont en effet obtenu d’importantes concessions minières (cuivre et cobalt) au Katanga. Si le premier a subi des revers après avoir perdu la présidence de la Gécamines (en mars 1999, au profit du Belge Georges Forrest), le second a obtenu, l’an dernier, une concession de vingt-cinq ans sur Kabankola, le plus riche gisement de cobalt du Katanga. Les deux hommes sont des proches d’Emmerson Mnangagwa, trésorier de la Zanu-pf et « dauphin » pressenti de Mugabe.

De leur côté, des généraux zimbabwéens et des barons du régime ont monté la société Osleg (Operation Sovereign Legitimacy) pour acheter et exploiter le diamant au Kasaï, en joint-venture avec Comiex, une société contrôlée par la famille Kabila. Ne disposant ni de capital ni d’expérience, ils ont fait appel à la société anglo-omanienne Oryx (reprise depuis par les Sud-Africains de Petra Diamonds). Oryx Zimcon a obtenu une concession de vingt-cinq ans sur Senga, le plus gros gisement diamantifère de la Miba.

Les Zimbabwéens ont également remporté la plus grosse part du gâteau, avec le projet d’exploitation de la forêt congolaise : selon l’ONG Global Witness, 33 millions d’hectares, soit 15 % du territoire congolais, auraient été accordés à la Socebo, une filiale d’Osleg. Un chiffre à peine croyable que conteste la Socebo, qui parle de 1,1 million d’hectares. Manquant de fonds propres, la société recherche des investisseurs extérieurs. Mais des soldats zimbabwéens sont déjà à pied d’oeuvre dans les forêts du Katanga. « Quand ces joint-ventures dans les mines et le bois deviendront profitables, lit-on dans le rapport de l’ONU, il sera tentant « pour le Zimbabwe » de garder une présence militaire importante en RDC. »

V.H.

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