Le challenge russe

Christian Makarian

C’est une partie très délicate qui se joue. Comme aux échecs, elle a de grandes chances de durer. Il y a un mois, a-t-on appris tout récemment, Barack Obama faisait remettre une lettre en main propre au président russe. Il y réaffirmait sa ferme intention d’ouvrir un nouveau chapitre dans les relations américano-russes, sous la forme d’une proposition honnête : en échange de l’appui de Moscou dans le dossier du nucléaire iranien, les Etats-Unis verraient naturellement diminuer la  » nécessité d’avoir un système de défense antimissile « . En clair, la Russie pourrait obtenir des concessions significatives – un gel ? une coopération ? – en ce qui concerne le bouclier antimissile qui doit être installé en Pologne et en République tchèque, à condition qu’elle fasse pression pour que l’Iran renonce à sa course à l’arme atomique. Dmitri Medvedev – qui apparaît privilégié par Washington, au détriment de Vladimir Poutine – a rejeté toute idée de marchandage, mais s’est, en revanche, félicité de cette ouverture. Or, lors des négociations entamées la semaine dernière entre Hillary Clinton et le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, la secrétaire d’Etat américaine a pu constater que le  » deal  » s’avérait bien plus compliqué. Certes, on a assisté à un changement de ton bienvenu. On a également souligné, de part et d’autre, la nécessité de relancer les discussions devant aboutir à un accord sur le traité de réduction des armes stratégiques Start 1, signé en 1991 et qui vient à expiration en décembre prochain. Mais, sur ce sujet comme sur les autres, tout reste à redéfinir, point par point, sachant que les Russes se montrent redoutables.

En vérité, la stratégie du Kremlin, telle que Poutine l’a dessinée, s’accommode de la tension actuelle et a été conçue à cet effet. Ayant globalement perdu pied au Moyen-Orient, Moscou voit dans l’Iran une pièce maîtresse et fournit au régime d’Ahmadinejad une part essentielle de son armement. La Russie est également le partenaire énergétique indispensable de Téhéran, puisqu’elle s’apprête à mettre en service la centrale nucléaire de Bouchehr, qui produira de l’électricité d’ici au mois de septembre. Il y a encore bien d’autres intérêts communs entre les deux pays. Quel avantage Moscou aurait-il à lâcher prise ? D’où le challenge : c’est encore aux Américains de faire tout le travail pour les Russes… sans reculer.

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Christian makarian

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