Le CD&V, ce grand corps malade

Le parti est groggy, mais pas KO. La révolution de palais que le CD&V a subie lui a fait perdre des plumes dans le gouvernement. L’aile droite a le vent en poupe au sein d’une formation déstabilisée, à la merci d’un énième combat des chefs.

Les sociaux-chrétiens flamands ont la gueule de bois. Ils abordent 2009 comme ils ont quitté 2008 : la peur au ventre, les nerfs à vif. Depuis leur retour au fédéral, en juin 2007, c’est l’enfer au lieu du paradis espéré. La malédiction s’acharne. Le divorce avec la N-VA à peine digéré, le parti ne se doutait pas que le pire restait à venir. La tornade qui s’est abattue sur la Rue de la Loi a décapité l’aile chrétienne-démocrate flamande version Leterme Ier. Celle-ci a dû renaître, méconnaissable, au sein de Van Rompuy Ier. Le chamboulement est décoiffant.  » Je vois encore Leterme, Vandeurzen, Vervotte danser sur la table au soir de notre victoire électorale en juin 2007. Nos trois figures de proue sont tombées de leur piédestal « , lâche un sénateur CD&V. On déprimerait pour moins que ça. C’est grave, docteur ? Dans ses vies antérieures, l’ex-CVP a connu d’autres passages à vide. Il les a souvent surmontés au prix de remous internes qui ont fait trembler le pays. Comment le CD&V pansera-t-il ses plaies cette fois-ci ?

Fragilisé. La récente crise politique a tourné à la plus totale confusion au sein du CD&V. Le parti doit laisser à quai trois locomotives électorales.  » Leterme, Vandeurzen, Vervotte pèsent plus d’un million de voix !  » grince un élu CD&V. Le trio ministériel Van Rompuy, De Clerck, Vanackere, qui a pris le relais, est loin d’égaler ce  » poids électoral « .

Mortifié. Vexation suprême : le jeu de chaises musicales à la Chambre causé par le remaniement ministériel prive le CD&V d’un député au profit de sonà ex-partenaire, la N-VA. Les railleries sont cruelles :  » L’altier paquebot du CD&V qui a pris le large en 2007 n’est plus aujourd’hui qu’un frêle esquif « , se gausse l’opposition flamande.

Révolté. Le CD&V se sent seul dans son malheur. Il crache sa bile sur ses partenaires et rivaux libéraux, flamands surtout, dont les ministres n’ont pas eu le même sens du sacrifice.

Déséquilibré. La grande lessive parmi les ténors du CD&V a rétréci l’aile ACW (Mouvement ouvrier chrétien) : au fédéral, la gauche du parti hérite de Steven Vanackere, certes bombardé vice-Premier ministre, pour suppléer le trio Leterme, Vandeurzen, Vervotte. Présidence du parti (Thyssen), ministres fédéraux (Van Rompuy, De Clerck, De Crem), tête du gouvernement flamand (Peeters) : le coup de barre à droite est sensible.  » Un tel déséquilibre aux postes clés est inédit « , relève un observateur.

Déboussolé. Wilfried Martens en explorateur royal, Herman Van Rompuy en Premier ministre, Stefaan De Clerck en revenant : la jeune génération CD&V encaisse ce retour en force de  » la vieille garde « . Les plus radicaux du combat communautaire en perdent aussi (provisoirement ?) la voix : le député flamand Eric Van Rompuy modérera, assure-t-il, ses propos pour ne pas contrarier son frère.

Lézardé. Le parti fait mine de serrer les rangs dans l’adversité.  » Déchirure non, malaise oui « , résume un ponte du CD&V. L’ex-ministre Inge Vervotte, fidèle de Leterme, y est allée d’un coup de gueule isolé. Aux allures de coup de semonce.  » Les militants sont fâchés.  » Leur dépit pourrait donner des ailes à l’une ou l’autre pointure avide de revanche sur le destin. Inutile de citer des noms : le CD&V collectionne les coqs de combat prêts à se voler dans les plumes.

Tétanisé. L’idée d’affronter l’électeur au scrutin régional de juin prochain glace le parti, tant son image est abîmée. La priorité : vanter le bilan de son action en Flandre, pour faire oublier ses déboires au fédéral. Mais ce n’est pas gagné.

P. Hx

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