La tentation norvégienne

A Oslo, la droite populiste espère attirer 1 voix sur 4 lors des législatives du 14 septembre. Et faire tomber le gouvernement rose-vert ?

DE NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL

A 22 ans, Mette Hanekamhaug deviendra peut-être, lors des législatives du 14 septembre en Norvège, la plus jeune députée du royaume et même d’Europe. En position éligible sur la liste du Fremskrittspartiet (Parti du progrès, droite populiste) dans la région d’Ålesund, célèbre pour la beauté de ses fjords, elle pourrait même doubler cette performance d’une autre prouesse. Car, si son parti fait mieux que les 22 % annoncés par les derniers sondages, elle et ses collègues espèrent faire tomber le gouvernement rose-vert au pouvoir depuis 2005. Et, pour la première fois, propulser le Parti du progrès aux affaires, au sein d’une coalition avec les conservateurs de Høyre (droite modérée). La Norvège s’alignerait alors sur les autres pays de la région (Suède, Danemark, Finlande), où, ces dernières années, la gauche a été balayée par les électeurs.

En attendant l’issue de ce scrutin serré, l’étoile montante mène sa campagne tambour battant. Notamment dans les lycées de sa circonscription où, comme partout en Norvège, des débats publics sont organisés, devant des élèves de terminale dont la présence est obligatoire. Devant 600 lycéens de la prospère cité portuaire d’Ålesund, l’un des fiefs du Parti du progrès, elle ironise :  » Ainsi, la Norvège se permet d’envoyer ses enfants combattre en Afghanistan mais leur interdit d’acheter de l’alcool avant l’âge de 20 ans. Aberrant !  » Tonnerre d’applaudissements. L’abolition du monopole d’Etat sur la vente de vins et spiritueux et l’abaissement à 18 ans de l’âge autorisé pour l’achat d’alcool figurent au programme du Parti du progrès.

Fondé en 1973 et longtemps considéré comme une formation d’extrême droite, ce dernier est devenu incontournable. Et fréquentable. Seulement devancé à gauche par les travaillistes (33 % d’intentions de vote), il a dépassé la droite modérée, qui n’a pas d’autre choix que de s’allier avec lui, comme c’est déjà le cas par exemple à Ålesund. Au vrai, l' » extrême droite  » du spectre politique norvégien correspond, grosso modo, en France, à la droite de l’UMP.  » Nous n’avons rien à voir avec des gens comme Le Pen ni ne possédons aucun lien avec Pia Kjaersgaard, du Parti du peuple danois [extrême droite], rappelle la jeune candidate, dont l’ex-petit ami était, précise-t-elle, indonésien. « 

Au c£ur du débat, les recettes pétrolières

Son inspiration, le Parti du progrès la trouve plutôt du côté de Margaret Thatcher, l’héroïne préférée de Siv Jensen. A la tête du mouvement, cette blonde quadragénaire veut réduire les impôts, privatiser la télévision publique, développer l’enseignement privé ou encore soumettre les fonctionnaires à la logique du résultat. L’immigration ? Le Parti du progrès veut y mettre un frein afin de mieux intégrer les étrangers déjà présents en Norvège. Autrefois politiquement incorrecte, cette approche est désormais largement admise par la classe politique, qui craint de voir éclore des banlieues ghettos, comme en Suède, ou des tensions religieuses comme au Danemark lors de la  » crise des caricatures « , en 2005.

Cependant, l’essentiel du débat électoral concerne l’utilisation du fonds souverain, alimenté depuis 1996 par les fabuleuses recettes pétrolières et gazières de la pétromonarchie scandinave. A la fin du mois de juin, il pesait 274 milliards d’euros. Le Parti du progrès voudrait puiser dans cette cagnotte pour investir dans les hôpitaux, les maisons de retraite, les routes, les écoles.  » Au lieu de cela, la crise boursière de 2008 a fait perdre 73,5 milliards d’euros au fonds (dont 60 % sont placés en actions à l’étranger). L’équivalent de dix années d’intérêts est parti en fumée.  » De quoi alimenter le ressentiment à l’égard du pouvoir sortant.

AXEL GYLDÉN

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