La retenue différée… sans retenue

Coincé entre le marteau de la crise financière et l’enclume des élections de juin prochain, le gouvernement lâche les cordons de la bourse et laisse se creuser le déficit budgétaire. Le rituel conclave budgétaire de l’été prochain devrait cependant sonner le glas du laisser-faire – laisser-aller…

Ces dernières semaines, au sein des secrétariats sociaux, ces organismes auxquels la majeure partie des employeurs confient la charge de calcul des paies – et la retenue des cotisations à l’ONSS ainsi que du précompte professionnel -, les informaticiens n’ont pas chômé. Il leur a fallu en très peu de temps adapter les logiciels de manière à intégrer le  » moratoire  » de trois mois octroyé temporairement par le gouvernement à toutes les entreprises pour le paiement du précompte professionnel ( NDLR : l’impôt retenu à la source sur les salaires). Les sommes en jeu sont pour le moins abyssales : pas moins de 3,5 milliards d’euros, selon nos confrères de L’Echo, ce qui représenterait in fine une baisse de l’équivalent de 9,5 % des recettes fiscales de mars, 23,4 % de celles d’avril et 25,7 % de celles de mai de cette année ! Pour assurer la soudure, le Trésor devra par conséquent se tourner dès la semaine prochaine vers le marché des capitaux…

Le cap des élections du 7 juin

Ce  » moratoire  » est sans conteste un ballon d’oxygène bienvenu pour toutes les entreprises qui subissent de plein fouet les effets de la crise et qui éprouvent des difficultés à trouver des liquidités auprès des banques. Reste que l’absence de sélectivité de cette mesure du plan de relance fédéral va se payer cash. En effet, contrairement aux dispositions prises au profit des entreprises en matière d’échelonnement des dettes de TVA – il faut à ce niveau procéder par requête et les conditions d’octroi sont assez restrictives -, le  » moratoire  » en matière de paiement de précompte professionnel est, quant à lui, octroyé d’office, et sans discernement aucun. Ainsi, des entreprises très florissantes, comme Electrabel, en profitent dès lors tout autant que des entreprises qui souffrent le martyre en raison de la crise. Bref, l’Etat fédéral verse ici encore un peu plus dans le surréalisme en s’endettant encore un peu plus, en supportant encore un peu plus de charges d’intérêts, pour finalement permettre à nombre d’entreprises qui n’ont pas particulièrement besoin d’aide de… gonfler encore un peu plus leurs placements de trésorerie et les revenus qui en découlent.

Or les arbres ne montent pas jusqu’au ciel ou, plutôt, les trous ne peuvent être creusés à l’infini. Au-delà du 7 juin, délivré des échéances électorales, le gouvernement aura alors certainement les coudées beaucoup plus franches pour un tant soit peu renverser la vapeur… au profit du budget fédéral bien trop mis à mal ces derniers temps.

Jean-Marc Damry

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