Comment réagit-on lorsqu'on se retrouve pris au piège ? Le Galactik Ensemble l'a testé pour nous. © PH. LEBRUMAN

La menace fantôme

Avec Optraken, les circassiens français du Galactik Ensemble déjouent et se jouent d’une menace omniprésente. Une performance millimétrée, rythmée par des chutes d’objets et qui met à l’épreuve la résilience humaine. A Mons et Bruxelles.

Sur le gril qui surplombe la scène, près d’une centaine de sachets en plastique blanc, bien visibles, contenant chacun un kilo de farine, attendent d’être lâchés un par un, grâce à un système de fermeture centralisée de voiture, avant d’atterrir avec un son sec, dur. C’est l’une des menaces, nombreuses, qui pèsent constamment sur les cinq interprètes d’ Optraken. Un titre emprunté au vocabulaire du ski :  » mouvement rapide de repli des jambes sous le corps permettant un saut contrôlé pour éviter un décollage intempestif au passage d’une bosse ou d’une rupture de pente « . Soit une réaction face à l’imprévisible, une stratégie de défense quand la situation dérape.

Comment réagit-on quand le sol se dérobe littéralement et que l’on se retrouve pris au piège ? Quand on est coincé sous le tir croisé de balles de tennis ? Quand, à tout moment, on peut être assommé par un pot de fleur ou par un livre ? Quand d’une seconde à l’autre on risque de tout perdre, ses meubles et même ses vêtements ? C’est la notion de résilience qu’interroge le Galactik Ensemble dans ce spectacle signé par des circassiens (les cinq garçons se sont rencontrés à l’Ecole nationale des arts du cirque de Rosny-sous-Bois, à l’est de Paris) mais qui n’est pas à proprement parler du cirque, plutôt une sorte d’objet visuel empruntant à la danse, au clown façon Buster Keaton, à l’acrobatie et à la magie. Un show qui, bien que son processus de création ait débuté avant, ne peut se voir aujourd’hui sans songer aux attentats de Paris et de Bruxelles.

Poussière

Depuis le 15 novembre 2015 et le 22 mars 2016, il n’est plus anodin de faire tomber une pluie d’amorces sur une scène. Et les bruits d’explosion rappellent désormais de terribles souvenirs. Une séquence de Optraken montre ainsi un homme s’ébrouer au ralenti avec des gestes de hip-hop pour secouer la poudre blanche qui le recouvre tout entier, évoquant ces images de victimes salies par la poussière des décombres.  » Le danger est partout « ,  » il ne faut pas sortir « ,  » il faut mettre le casque, c’est la seule solution « , crie ailleurs un membre du quintette avant de tomber inanimé sous le poids d’une plaque Gyproc tombée du ciel.

L’être humain semble peser bien peu dans Optraken. Au départ, il est même absent, laissant trois panneaux gris, immenses, occuper la scène, et s’avancer au son de cloches avant de devenir de véritables partenaires de jeu. L’homme ici est effaçable, interchangeable, évacuable. Mais pas impuissant. C’est que le Galactik Ensemble garde tout de même l’espoir dans ce contexte sombre. Face aux dangers et aux obstacles, il y a la ruse individuelle et la solidarité du groupe. Quand tout devient instable, ces cinq-là explorent l’art de l’esquive, prennent la gravité à la légère et se redressent, vaille que vaille, après chaque chute. Jusqu’à ce que le dernier sac soit tombé du plafond, que tout danger ait disparu et que les spectateurs puissent enfin reprendre leur souffle. Ouf !

Optraken : le 25 février au théâtre Le Manège à Mons, www.surmars.be ; le 28 février et le 1er mars aux Halles de Schaerbeek, www.halles.be

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire