Au parlement de Wallonie, trois cas justifient le versement d'une indemnité de départ à ses membres. Contestable ? © ERIC LALMAND/BELGAIMAGE

 » La bonne gouvernance, c’est pouvoir se regarder dans le miroir sans détourner les yeux « 

Il est parfois difficile de ne pas verser dans le poujadisme et le  » tous pourris « . Je veux continuer à croire qu’un grand nombre font de la politique par réelle conviction. Je doute cependant que ce soit le cas de ceux qui ont adopté, en mars 2014, le règlement du parlement wallon relatif aux indemnités de ses membres. L’article 11 précise que les membres du parlement wallon qui démissionnent en cours de législature reçoivent une indemnité mensuelle de départ, dans trois cas, dont celui où le Bureau (1) décide qu’il s’agit d’un cas de force majeure, ce qui serait le cas aujourd’hui pour ceux qui vont devoir démissionner de leur poste de député pour prendre des fonctions au niveau local.

Le site de Droits quotidiens (2), qui vise à mettre le langage juridique à portée de tous, précise que,  » en droit, la force majeure vise un événement soudain, imprévisible et inévitable, qui n’est pas dû à la faute d’une personne. Cet événement ne doit pas avoir été voulu par elle, ni causé par elle, même indirectement.  »

Il est incompréhensible que les membres de ce Bureau aient considéré que le fait de démissionner de son poste de député, parce qu’on a fait campagne aux élections communales ou provinciales, qu’on a été élu et qu’on est appelé à exercer un mandat au niveau local, soit d’une quelconque manière considéré comme  » soudain, imprévisible et inévitable « . Cette décision est donc un abus total de pouvoir et ressemble tellement à un petit arrangement entre amis. […]

A mon avis, à la question  » Accepteriez-vous que je reçoive plusieurs milliers d’euros d’indemnités (3) si, après avoir fait campagne pour les élections communales ou provinciales et après avoir été élu, je décide de plein gré de quitter le parlement wallon ? « , tout électeur répondrait, comme moi :  » Non, je ne suis pas d’accord « . Mais peut-être a-t-on une autre définition de la bonne gouvernance que ceux qui ont adopté cette mesure ?

Pour moi et pour beaucoup d’autres, bien gouverner veut dire : se rappeler constamment qu’on n’est que le représentant temporaire des électeurs ; qu’on leur doit le respect et une transparence totale ; qu’on doit faire le travail avec sérieux et professionnalisme ; que chaque fois qu’on prend une décision qui a une implication financière, on doit garder à l’esprit qu’on utilise l’argent des autres.

En fait, la bonne gouvernance, c’est peut-être simplement pouvoir se regarder dans le miroir en fin de journée sans détourner les yeux.

J’interpelle alors personnellement les députés potentiellement concernés par cette indemnité : Véronique Bonni (Dison, PS), Laetitia Brogniez (Philippeville, MR), Jean-Marc Dupont (Frameries, PS), Jordan Godfriaux (Perwez, MR), Bruno Lefèbvre (Ath, PS), Patrick Lecerf (Hamoir, MR), Carine Lecomte (Arlon, MR), Dimitri Legasse (Rebecq, PS), Maurice Mottard (Grâce-Hollogne, PS), Isabelle Stommen (Welkenraedt, CDH), Valérie Warzée-Caverenne (Hamois, MR) (4).

Prenez une décision courageuse et désintéressée. Refusez cette indemnité. Montrez concrètement que la politique pour vous est un engagement avant d’être une carrière. Faites passer l’intérêt collectif avant votre intérêt personnel. Epatez-nous ! … et épatez-vous !

Le parlement wallon annonce, sur son site Web et sur sa façade, qu’il n’y a pas que le jour des élections que notre voix est importante. Qu’il le prouve aujourd’hui en clarifiant ces fameux cas de force de majeure et en soumettant ce point au débat parlementaire mais surtout public !

(1) Composé, selon le site du parlement de Wallonie, d’André Antoine (CDH), de Jacqueline Galant (MR), d’Olivier Destrebecq (MR), de Christophe Collignon (PS) et de Sophie Pécriaux (PS).

(2) www.droitsquotidiens.be.

(3) La presse a annoncé 100 000 euros mais le montant serait plutôt de 50 000 euros, les 50 000 euros restants auraient été prévus pour le préavis des collaborateurs au cas où le remplaçant ne les conserverait pas. Par ailleurs, il s’agit d’un montant maximum. Le montant effectif serait calculé en fonction de l’ancienneté du parlementaire.

(4) Isabelle Stommen, qui deviendra présidente du CPAS de Welkenraedt en janvier 2019, a, quant à elle, refusé de toucher l’indemnité qui lui était proposée.

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