» L’UTILISATION DU TASER EST LOIN D’êTRE LA PANACéE « 

Pour Pierre Thys, criminologue et professeur à l’Université de Liège au sein de l’Unité d’analyse et d’intervention en matière de violence, le recours au Taser n’est pas la bonne solution face à la montée de violence contre les policiers.

Le Vif/L’Express : Etes-vous favorable à l’utilisation du Taser par les forces de l’ordre belge ?

> Pierre Thys : Non, pas du tout ! Je vois au moins trois raisons de ne pas autoriser le recours au Taser pour nos policiers. Premièrement, c’est une arme extrêmement compliquée à manier, avec des résultats très aléatoires. Deuxièmement, le Taser est une arme  » one shoot « , ce qui signifie qu’une fois qu’on a tiré un coup, il faut recharger l’appareil. Ce qui demande un certain temps, durant lequel le suspect peut en profiter pour riposter violemment. Enfin, je pense que cette arme est inacceptable socialement. Il est extrêmement choquant de voir quelqu’un chuter violemment avec une crise d’épilepsie. Il y a un risque réel de banalisation de la violence dans notre société.

L’un des arguments des défenseurs du Taser est de diminuer le risque de mort d’hommes lors des interventions policières.

> L’adjectif  » non létal « , ça ne signifie rien du tout ! Dire qu’une arme est  » non létale  » c’est évidemment accrocheur dans une logique anglo-saxonne lorsqu’on présente le Taser comme alternative à l’arme à feu. On comprend que c’est très enthousiasmant pour les policiers américains. Ils dégainent beaucoup plus vite. Mais, chez nous, les policiers n’ont pas cette culture. En moyenne, sur une année, 662 personnes décèdent aux Etats-Unis suite à un tir de la police alors qu’en Belgique le chiffre tombe à un ou deux individus. Il est faux de dire que, dans le cas belge, le Taser est une alternative à l’utilisation d’armes à feu.

Aujourd’hui, une soixantaine de pays ont autorisé le recours au Taser pour les forces de l’ordre, pourquoi cet engouement pour ce type d’armes ?

> Les politiques réagissent émotionnellement sans connaître le fond des dossiers lorsqu’il s’agit du sécuritaire. Ils voient dans le Taser un outil alternatif à l’arme à feu qui ne donnerait pas la mort. Il s’agirait de l’arme idéale. On peut comprendre leur préoccupation face à l’augmentation – réelle – des violences à l’encontre de nos forces de l’ordre. Il est d’ailleurs indispensable de trouver les meilleures solutions face à ces actes, mais, je le répète, le Taser est loin d’être la panacée.

A.F.

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