L’Olimpiade ou le  » pasticcio  » retrouvé

Bientôt les Jeux olympiques de Londres. Comme en anticipation, voici L’Olimpiade, un étonnant coffret de musique baroque. Seize compositeurs du XVIIIe siècle rassemblés autour d’un livret initial signé Pierre Métastase. Rencontre avec Julian Fifer, producteur new-yorkais de ce  » pasticcio « .

Au sens propre, c’est un pâté. Au sens figuré, il ne faut pas le confondre avec un  » pastiche  » en tant qu’imitation de styles. Par contre, la connotation de  » composite  » reste bien présente. Le  » pasticcio  » est en effet une £uvre lyrique hétérogène très en vogue durant le baroque italien.  » Nous avons voulu retrouver le plaisir du pasticcio à partir de L’Olimpiade du poète Pierre Métastase (1698 – 1782), explique Julian Fifer. Pour les producteurs d’opéra, le pasticcio était un moyen d’assurer le succès. Le public avait ses histoires, ses arias et ses interprètes préférés.  » Ce modèle convient donc bien à l’esprit de l’  » opera seria  » qui consistait à réunir des arias autour d’une situation dramatique de base.  » Nous avons conçu ce pasticcio en rassemblant les arias signées de la main de 16 compositeurs choisis parmi ceux qui ont mis le livret en musique, renchérit Julian Fifer. Les différentes versions enregistrées ici sont autant de réponses musicales aux personnages et intrigues imaginés par Métastase.  »

Mais pourquoi les Jeux olympiques ?  » Tout le XVIIIe raffolait de ce thème. De nombreux librettistes ont planché sur le sujet. Mais L’Olimpiade de Métastase était sans doute le plus célèbre du siècle « , assure Julian Fifer. L’intrigue est simple et facilement adaptable : les meilleurs athlètes participent à une rencontre sportive dont le gagnant se voit offrir la main de la fille unique du roi. Bref, une structure dramatique imparable autour de la jeunesse et de la culture du corps combinée au spectacle des émotions fortes.

La genèse du projet ?  » C’était en 2006. Avec Andrea Marcon, directeur musical de l’Orchestre baroque de Venise, je préparais la mise en scène d’une £uvre de Galuppi sur ce fameux livret de Métastase. Nos recherches nous ont conduits de découvertes en émerveillements : des dizaines de compositeurs avaient mis cette histoire olympique en musique. Un corpus gigantesque et inexploré ! Et pas des créateurs de seconde zone, ne croyez pas que la théorie de Darwin s’applique à la sélection des espèces musicales ! insiste Julian Fifer. Ils nous ont laissé de magnifiques arias inexplorés à l’enregistrement. Qui connaît la musique, voire le nom, de Traetta, Leon, Perez ? Ou Myslivecek, ce compositeur que Mozart admirait, même s’il raillait la laideur de son nez. « 

Julian Fifer estime que les charmes bigarrés du pasticcio conviennent bien à l’esprit du mélomane d’aujourd’hui qui n’a pas toujours l’occasion de se couler des heures dans le déroulé d’un même opéra.  » Mais avec l’idée de découverte, répète-t-il : faire connaître des compositeurs comme Gassmann ou Jommelli que le thème de L’Olimpiade nous a permis de rassembler. Tout en les faisant profiter du levier de notoriété de leurs stars de collègues : Pergolesi ou Vivaldi.  » L’attrait du pasticcio augmenté de celui de l’olympisme : une potion magique pour stimuler le public du disque classique ? Gare aux médailles d’or.

PHILIPPE MARION

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