Engagez-vous, qu'ils disaient. © NICOLAS MAETERLINCK/belgaimage

L’interrégionale ne sera pas le genre humain

Le PS est mal à l’aise sur certains sujets, sur lesquels il évite de faire campagne. Raison de plus pour en parler.

Fût-il désormais écosocialiste, soit-il depuis toujours internationaliste, le PS préfère mener sa barque dans les eaux froides du calcul socio-économique que dans la mer montante du changement climatique ou dans les vagues migratoires : il barbote avec bien plus de fluidité dans un bain de sang social (lire par ailleurs) que climatique, identitaire ou même communautaire. Il y a sur ce sujet, une fois n’est pas coutume, accord complet entre Elio Di Rupo et son successeur moyennement désigné Paul Magnette : le PS ne pourra redevenir incontournable au sud du pays qu’en portant des mesures fiscales et sociales frappantes.

Il le fait, à la suite du Chantier des idées (2015-2017), avec une unité assez remarquable, promettant s’il revient au pouvoir là où il n’y est plus, d’introduire un impôt sur la fortune, de globaliser les revenus du travail et du capital pour les imposer plus justement, ou d’individualiser les droits sociaux pour en finir avec le statut de cohabitant, notamment. Pour cela, il faudra, répond-on immanquablement à l’immanquable question sur les coalitions envisagées, composer les majorités  » les plus progressistes possibles « .

De fait, ces trois mesures sont au programme du PTB et d’Ecolo, et ne choqueraient pas violemment le CDH ni DéFI. Le problème, et personne n’ose ni le dire, ni même le penser au PS, c’est que, disposerait-il d’une majorité absolue à Bruxelles et en Wallonie, jamais ces trois mesures ne pourraient s’appliquer. Elles dépendent, comme la plupart de celles qui pourraient vraiment compter, du fédéral. Donc d’une coalition avec des Flamands. Or, chez eux, on est tellement à droite que même les verts de Groen ne veulent pas supprimer le statut de cohabitant : au niveau fédéral, la  » majorité la plus progressiste possible  » comptera donc à peu près nécessairement des libéraux et des chrétiens-démocrates. Autrement dit, là où le PS (re)dominera peut-être après le 26 mai, soit dans les entités fédérées, il ne sera en mesure que de gérer le quotidien, comme il le faisait depuis des décennies, accroché là où il ne dominera pas à son mantra du  » sans nous ce serait pire « , parce qu’en effet, au fédéral, il ne pourra pas faire mieux. La situation de la Wallonie et Bruxelles, Régions disposant de compétences économiques somme toute marginales et de surcroît privées d’accès à la mer, privées d’un aéroport d’envergure internationale, privées d’assiette fiscale significative, rend en effet soit absurdes, soit impraticables, soit inconstitutionnelles toute grande réforme de gauche.

Ainsi s’énonce le tabou d’un parti parfois gagné de tartarinades renardistes alors que les compétences des Régions et la puissance de la droite flamande lui interdisent toute réforme de structure marquée à gauche. Il sait qu’il ne pourra tout changer qu’à un niveau de pouvoir où personne ne voudra changer quoi que ce soit. Mais il ne le dit pas. Parce qu’il ne veut pas oser y croire.

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