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L’institut(ion)

Le Stephen King de l’année fait partie de ses bons crus : un thriller horrifique qui retourne aux sources de ses inspirations, entre bande d’enfants et pouvoirs surnaturels.

Luke Ellis n’est pas un gamin comme les autres. Il n’est pas non plus un gamin surdoué comme tous les autres :  » Luke est un enfant américain typique, qui porte des tee-shirts de rock et met sa casquette à l’envers  » mais il a aussi une mémoire eidétique, un QI de plus de 175 et a d’ores et déjà été accepté, à 12 ans, dans deux prestigieuses universités.  » Luke est différent, en ce sens qu’il est complet. Avec lui, ce n’est pas juste une chose, c’est tout.  » Ce tout englobe même un peu de télékinésie quand il est frustré ou malheureux :  » C’est dans ces moments-là que les assiettes s’entrechoquent et que les portes se ferment toutes seules.  » Une somme de dons qui explique sans doute son kidnapping : en pleine nuit, des inconnus pénètrent chez lui, assassinent ses parents et emportent le gamin, qui se réveille dans une chambre qui ressemble à la sienne, mais qui ne l’est pas. Derrière la porte, il y a un couloir, d’autres chambres, d’autres gamins et quelques affiches improbables annonçant  » un jour comme les autres au paradis « . Bienvenue à L’Institut, une institution secrète qui emprisonne des gosses, les torture et leur vide le cerveau avec  » un objectif commun. Louable en quelque sorte : sacrifier quelques enfants pour empêcher l’espèce humaine de s’auto- détruire « Bienvenue surtout dans le dernier roman de Stephen King (1), mythe vivant de la littérature américaine et de la pop culture mondiale. Un 60e opus qui résume bien le multiverse du bonhomme, à nouveau en pleine forme.

Patine et références

Un Institut qui rappelle La Boîte de Charlie, des pouvoirs de télépathie et de télékinésie qui renvoient à Dead Zone, à nouveau à Charlie et, bien sûr, au Shining, une bande d’ados solidaires comme dans Ça, comme dans Le Corps (nouvelle qui donna au cinéma Stand By Me) et comme dans beaucoup de ses romans et nouvelles, ou encore  » un gamin et un héros égaré qu’il avait ramassé en chemin  » comme dans sa série La Tour sombre… C’est certain, cet Institut-là revient aux sources de l’univers de Stephen King, fasciné par l’enfance, par les peurs qui n’appartiennent qu’à elle et par des superpouvoirs essentiellement psychiques, mais ce, avec quarante- six ans d’écriture et de best-sellers derrière lui.

L'Institut, par Stephen King, traduit de l'anglais (américain) par Jean Esch, Albin Michel, 602 p.
L’Institut, par Stephen King, traduit de l’anglais (américain) par Jean Esch, Albin Michel, 602 p.

Bien sûr, on retrouve comme toujours son goût pour l’Amérique profonde ( » L’Amérique était encore et toujours un beau pays, même si certains (lui y compris parfois) affirmaient le con- traire « ), pour les métaphores parfois faciles ou improbables ( » Ils étaient comme des braconniers prêts à tuer un éléphant de cinq tonnes pour quarante kilos d’ivoire « ) et pour les références à la pop culture (il cite ici entre autres Tyrion Lannister, Eminem, Dr Seuss et les  » précogs  » de Philippe K. Dick). Mais le tout est cette fois enrobé d’une patte et d’une patine qui lui confèrent toutes les latitudes, de son improbable et longue introduction loin de cet Institut annoncé dès le titre, à la profonde noirceur qu’il inculque cette fois à son éternel récit du combat du Bien contre le Mal. A 72 ans, King reste décidément le roi.

(1) L’Institut, par Stephen King, traduit de l’anglais (américain) par Jean Esch, Albin Michel, 602 p.

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