La couleur orange des images de normographes de Jonathan Steelandt n'est pas sans évoquer les fonds d'or de la peinture sacrée d'autrefois. © Jonathan Steelandt / Le Salon d'art

L’ abstraction géométrique réinventée

Il n’y a pas que les grands hommes et les légendes qui ne meurent jamais. Certains courants plastiques, eux aussi, connaissent des destins à rebondissement. Ainsi de l’abstraction géométrique, mouvement fleuve ayant surgi au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, dont de nouvelles pages ne cessent de s’ écrire.

En la matière, la Belgique n’a rien du cancre de la classe. Si l’on connaît le succès d’un Jo Delahaut, on sait moins les derniers éclats de cette pratique programmée et systématique. En ce moment, à Bruxelles, Le Salon d’art accueille le travail d’un photo- graphe qui relance joyeusement cette aventure formelle. A propos de Jonathan Steelandt (1975), le peintre Léon Wuidar, à qui l’on peut faire confiance, évoque « la peinture sacrée d’autrefois ». Il est vrai qu’en découvrant ces images, on ne peut s’empêcher de louer une incandescence rappelant l’or des icônes ou, pour les amateurs d’une mystique sans dieu, les fulgurances d’un Rothko, voire les lumières métaphysiques crépusculaires d’un De Chirico. De quelle alchimie procède cette pratique, d’où nous vient-elle? Comme souvent, l’ étincelle naît ici d’un lexique de base, d’un arte povera que le confinement a favorisé. Le galeriste Jean Marchetti explique: « C’est à partir des normographes de son grand-père ingénieur que Jonathan Steelandt imagine ses oeuvres. L’ artiste utilise ces instruments Rotring, qui marquent lettres et chiffres sur tout support, pour créer formes et couleurs par la lumière. Son objectif consiste à matérialiser la transparence. » Cet impalpable, l’intéressé a fait voeu de l’épuiser en déployant une combinatoire que Leibniz n’aurait pas reniée. Le procédé est simple: éclairés par deux ou trois sources lumineuses, les normographes de couleur (orange, bleu et vert) sont disposés de différentes façons sur un fond blanc neutre. Photographiés de près, ces outils de mesure engendrent des volumes et des nuances chromatiques inattendues… sans qu’il ne soit procédé à une quelconque retouche de type Photoshop. L’éblouissant résultat invite à la contemplation et au silence.

Au Salon d’art, à Bruxelles, jusqu’au 16 octobre.

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