Katanga détresse

Dans les mines du Katanga, plus de 300 000 creuseurs artisanaux venus de tout le Congo grattent le sol et cassent des cailloux pour gagner de quoi survivre.

Torses nus ou en tee-shirts usés, les cheveux gris de poussière, ils creusent, sous un soleil de plomb, le sol ocre, jaune et blanc. Combien sont-ils, ces mineurs artisanaux omniprésents sur les sites de Likasi, Kambove, Kolwezi et Kipushi, au Katanga ? Selon un rapport récent de la société civile, les mines de la province comptent plus de 300 000 creuseurs artisanaux, dont 30 000 à 40 000 enfants.  » Ils viennent de partout, raconte Rola Abboud, coordinatrice, à Lubumbashi, de l’ONG belge Groupe One, qui, depuis trois ans, tente de retirer des enfants de la mine pour les scolariser et les réinsérer dans la société : certaines recrues sont katangaises, mais d’autres sont originaires du Kasaï, du Kivu, de Kisangani et même du Bas-Congo. Les plus jeunes sont affectés au ramassage, au triage et au remplissage des sacs. D’autres se chargent du transport du minerai du puits à la rivière et du tamisage, ou encore de la vente de beignets. « 

Armés de pioches, les plus expérimentés, appelés les  » attaquants « , creusent la roche au fond des galeries.  » Un creuseur adulte gagne, actuellement, une trentaine de dollars par jour « , assure un négociant local. Une autre source parle de 150 à 500 dollars par mois. Un certain flou règne autour des données. L’Observatoire du changement urbain de l’université de Lubumbashi avance les chiffres suivants pour les enfants des mines : un quart d’entre eux gagneraient moins de 1,5 dollar par jour, la moitié entre 1,5 et 7 dollars et le quart restant entre 7 et 30 dollars.

La libéralisation du secteur minier, voici une douzaine d’années, a donné le coup d’envoi de la  » ruée vers les mines « . Les enfants des rues et déplacés de guerre ne sont pas les seules recrues. Le  » métier  » de creuseur artisanal attire aussi les victimes du phénomène de l’  » enfant-ration  » : la pauvreté généralisée et le besoin de biens de première nécessité conduisent les parents à encourager leurs rejetons à travailler dans la mine pour contribuer à assurer le repas du soir.

Résultat : ces jeunes, comme la plupart des autres creuseurs, souffrent d’infections pulmonaires à cause de la poussière des carrières. De même, l’effondrement des galeries, jamais étayées, tue presque chaque jour des creuseurs, surtout pendant la saison des pluies, entre octobre et mars.

Près de la moitié des creuseurs artisanaux ont quitté les mines suite à la chute brutale des cours du minerai, à la fin de l’an dernier. Les plus jeunes sont restés. Les autres se sont tournés vers d’autres métiers : charbonniers, agriculteurs… Mais la crise, qui touche sévèrement tous les secteurs économiques au Katanga, a aussi provoqué une hausse vertigineuse du chômage, de la mendicité et de la criminalité.

Reportage photo : Kris Pannecoucke – Texte : Olivier Rogeau; O.R.

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