Johnny dit tout

Christophe Barbier
Christophe Barbier Directeur de la rédaction de L'Express

Le rockeur, qui appartient à tous, a raconté son existence exceptionnelle à l’écrivain Amanda Sthers. Elle l’a sublimée en une époustouflante confession. Hallyday, à vie et à vif : extraits exclusifs.

Je ne croyais pas au concept de star, jusqu’au jour où j’ai croisé Johnny « , déclara, il y a vingt ans, Jean-Jacques Goldman. De fait, après s’être fait un nom vite devenu un prénom, le rockeur est passé lentement au rang d’institution, de monument national, de mythe. Au-delà de l’éculé  » on a tous quelque chose de Johnny « , il règne depuis longtemps une familiarité composite entre le chanteur et son public. Qu’on le moque à la suite des Guignols ou qu’on l’adule comme les foules mêlées de bikers, de cols blancs et de prolos, on connaît Johnny, ce compagnon d’un demi-siècle de music-hall. L’homme aux 180 tournées, aux presque 30 millions de spectateurs et aux plus de 100 millions de disques vendus n’est pas qu’un phénomène, il est un paysage : au long de ses tubes ou de ses shows géants, on a vu défiler l’esprit des blousons noirs, le kitsch des années 1970, l’arrogance des eighties, l’avachissement de la fin du XXe siècle et le mal-être qui baigne le début du suivant. Johnny, ce baromètre de notre météorologie collective.

Sous l’érosion des années, sous les coups du temps, dans les tempêtes de la vie, Johnny s’est buriné et statufié. La silhouette est passée du caoutchouc à l’airain ; la gueule, de l’ange au Méphistophélès ; le coeur, de l’artichaut au cuir… Seuls demeurent, immarcescibles à travers les modes et les moods, son regard et sa voix, l’acier et le bronze. Et le fil des ans pour se poser des points de suture.

A quelques rares reprises, de bon gré ou étranglé par le voyeurisme, par souci sincère de se confier ou poussé par un marketing lucratif, Johnny Hallyday a tenté de raconter son existence. Il livra des bribes et des ombres, parfois quelques vérités arrangées ou un mélo sirupeux. Cette fois, avec Dans mes yeux (Plon), est la bonne. Pour accoucher le chanteur d’une telle confession, il fallait une sage-femme qui ne soit pas une femme sage. Amanda Sthers offre, bien sûr, son immense talent de plume à cette autobiographie sublimée : elle raconte mieux que lui ce qu’il raconte malgré lui. Johnny, si rétif à la polémique, crache soudain des avis bien sentis sur Michel Sardou, Claude François et son propre fils David. Hallyday, si maladroit avec la langue française, s’élance d’un coup en figures de style. Il y a des ailes de poète qui poussent sur les micros. Mais, ni nègre ni pygmalion, Sthers est surtout une confidente en résonance, qui sait combien célébrité rime avec brutalité et pourquoi des cicatrices suintent les encres les plus fortes.

En exclusivité, Le Vif/L’Express vous présente les passages les plus éloquents de ce destin couturé et cabossé, de ces Mémoires d’un artiste qui n’a pas oublié de vivre et que la vie n’a pas oublié. Ses femmes, ses doutes, ses effrois et son escapade sur les rives du Styx, en décembre 2009… Au dernier mot, à la dernière note, il reste le blues, qui n’est que le nom donné par Johnny à sa peur de la mort, à son enfance meurtrie et à cette infinie tristesse dont il a tressé des cordes pour sa guitare.

CHRISTOPHE BARBIER

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