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J’étais à l’enregistrement d' »À votre avis », et tout est vrai

Mélanie Geelkens
Mélanie Geelkens Journaliste, responsable éditoriale du Vif.be

Les vacances, quelle galère. La presse écrite peut encore espérer choper un politique cinq minutes par téléphone avant une virée en cuistax à Blankenberge ou une randonnée à La Roche-en-Ardenne. Mais la télé peut se brosser. Les congés, ce seul moment de l’année où les élus préfèrent la mer ou les Ardennes aux caméras. Sauf que les émissions dominicales, elles, ne font pas de break.

Ça tombe bien, les journalistes non plus. Cinq roues de secours médiatiques feront l’affaire. Trois hommes (L’Echo, Sudpresse et RTBF), deux femmes (Le Soir et, donc, Le Vif/L’Express) qui ne savent pas exactement de quoi ils vont parler. En lançant ses invitations, le présentateur Sacha Daout ne l’a pas vraiment précisé, alors personne n’a rien préparé. Ce dimanche-là (ensoleillé à vous donner l’envie de filer à Blankenberge ou La Roche-en-Ardenne), le rendez-vous est fixé à 15h15 : grande première, A votre avis est enregistré une semaine à l’avance, dans la foulée du premier débat. Toujours pour cause de vacances, mais dans les conditions du direct quand même. Diffusion ce 9 avril.

Pendant que les maquilleuses s’affairent, un écran retransmet l’enregistrement en cours sur le plateau. L’évêque de Liège, Monseigneur Jean-Pierre Delville (encore quelqu’un qui ne prend pas de congés) parle de religion. On ne sera pas plus précis, faudrait pas spoiler. Du coup, on ne vous dira pas non plus en détail de quoi les cinq journalistes-rustines ont finalement discuté. La RTBF avait sondé ses spectateurs. Quelle actualité, depuis le début de l’année, les avait le plus marqués ? Quel suspense insoutenable ! Les trois hommes placent qui une tablette, qui une feuille de papier griffonnée, qui un cahier fermé sur la table ( » merci de bien vous asseoir devant le trait « ), histoire de se donner une contenance (puisque personne n’avait rien préparé).  » Les citoyens ont-ils encore confiance en la classe politique ? « , entame Sacha Daout, parfait dans son rôle de distributeur de paroles à ceux (en fait, juste à celle) qui ne sont pas habitués aux débats télévisés.  » Les médias en font-ils trop ?  » Assurément, les invités sont les mieux placés pour objectiver.

La conversation dévie sur l’absence des jeunes en politique et sur un vieux chef de parti qui s’accroche à son poste. Puis sur un président récemment élu qui déteste autant les journalistes que les migrants, et dont le comportement méprisant pourrait bien inspirer nos édiles.  » Qu’est-ce que vous croyez que les élus disent de nous quand nous ne sommes pas là ? réplique en substance le participant made in RTBF. Qu’on est des empêcheurs de tourner en rond, qu’on les ennuie.  » Ouh, les vilains ! Et d’enchaîner sur la nécessité, pour les médias, de ne pas se  » hillaryser « , soit se couper des réalités de la population.  » Que les journalistes décrivent ce qui se passe et non ce qui devrait se passer, poursuit – toujours en substance – ce même intervenant. Qu’ils arrêtent de donner leur opinion à tout bout de champ, si ce n’est pas dans leurs pages, alors sur les réseaux sociaux ou leur blog. Ils ne sont pas là pour ça. Qui va payer un journal pour connaître leur avis ?  » C’est vrai, ça. Qui aurait envie d’allumer sa télé pour savoir ce que pensent des journalistes ?

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