Hasnaa Bennani, soprano ensorcelante

Barbara Witkowska Journaliste

L’étoile montante du répertoire baroque nous régale avec un superbe CD de cantates baroques françaises et un récital en hommage à Francesca Cuzzoni, l’interprète préférée de Haendel. Rencontre.

Pour ce nouveau CD (1), Hasnaa Bennani et l’ensemble Stravaganza nous ont concocté un programme tout de lumière et de grâce mêlant des oeuvres connues (Orphée de Jean-Philippe Rameau) et des raretés (cantate Ariane de Philippe Courbois). Dès les premières mesures, on est emporté : entre émotion, raffinement et intensité, la jeune cantatrice de 28 ans trouve toujours le ton juste.

Née à Rabat, Hasnaa s’initie au chant et aussi au violon.  » Au Maroc, on commence à s’intéresser à la musique classique occidentale, confie-t-elle. C’était la volonté de mon père, il nous a mis tous les trois à la musique, ma soeur Jalila est chef de choeur, mon frère Reda joue du piano.  » Sa voix d’or est repérée, lors d’un concert, par un membre mélomane de la coopération culturelle française au Maroc. On lui propose une bourse.  » C’était une vraie chance car au Maroc mes envies n’étaient pas réalisables.  » Au Conservatoire de Paris, elle se dirige vers le chant, dans la classe de Glenn Chambers. Un stage, organisé par l’académie de musique ancienne du Festival du Périgord Noir, lui fait découvrir la musique baroque, encore totalement inconnue au Maroc.  » En voyant Les Indes galantes de Rameau, je me suis dit « c’est ça que je veux faire ».  »

Après le stage, elle s’inscrit à un cursus de musique ancienne au Conservatoire de Paris. Les grands baroqueux la remarquent. Jean-Claude Malgoire est le premier à lui donner sa chance dans Vénus et Adonis de John Blow. Suivront Vincent Dumestre, Christophe Rousset et, bien sûr, Hervé Niquet.  » Hasnaa Bennani est absolument charmante, nous déclare le chef du Concert spirituel. J’ai travaillé avec elle dans Castor et Pollux de Rameau. Elle a eu deux rôles et chaque rôle avait sa consistance et son sens. Hasnaa a été parfaite musicalement et théâtralement, très professionnelle, et s’est très bien entendue avec tout le monde.  »

Hasnaa Bennani entame une tournée avec les Muffatti qui passera par Charleroi et Spa (2). Ce sera un hommage à Francesca Cuzzoni, interprète fétiche de Haendel. Originaire de Parme, la prima donna assoluta avait une voix d’une agilité incroyable mais pouvait se montrer sauvage et violente. Une vraie furie. Selon la légende, Haendel, excédé un jour par ses caprices, a menacé de la jeter par la fenêtre ! Mais il lui a écrit environ 80 arias sublimes dont Hasnaa interprétera les plus belles.

Etre la Suzanne de Mozart

Dans ses projets pour 2016, épinglons, le 5 juin, un Concert pour la paix des religions au château de Chantilly en France.  » J’ai déjà participé, au Maroc, au Choeur des trois cultures. On a chanté en hébreu, en arabe, en français et en latin. Pour moi, ce sont des rencontres des plus riches et je réponds toujours « oui » à ce genre de propositions. Au-delà des concerts, les artistes se doivent d’avoir des engagements et de montrer que la cohésion peut se faire, surtout dans le climat actuel.  » Son voeu ?  » Je n’ai pas de plan de carrière. La musique ancienne me comble, j’aime défendre des oeuvres inconnues. Je voudrais monter davantage sur les planches. Je rêve d’incarner Suzanne dans Les noces de Figaro de Mozart. Certes, c’est une soubrette, mais c’est un rôle qu’il faut tenir du début à la fin, au niveau théâtral et vocal et qui demande une grande responsabilité !  »

(1) Ariane & Orphée. Cantates baroques françaises, 1 CD, Muso-Harmonia Mundi.

(2) Le 27 novembre, au Palais des Beaux-Arts de Charleroi. Le 28 novembre, au Centre culturel de Spa.

Barbara Witkowska

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