Fortis : silence, on négocie

Changement de ton dans le dossier Fortis : l’Etat et le holding ouvrent la porte aux défenseurs des petits actionnaires et aux syndicats. Cela suffira-t-il à trouver un accord avant la date butoir du 28 février ?

Au sortir de l’assemblée générale des actionnaires, qui s’est tenue la semaine passée à Bruxelles, une question brûlait toutes les lèvres : comment l’Etat belge allait-il réagir ? Bien que les propriétaires d’actions Fortis eussent rejeté les trois opérations soumises à leur vote (avec les Pays-Bas, la Belgique et BNP Paribas), elles restent, juridiquement, en vigueur.

Traduction : notre gouvernement est toujours propriétaire de 100 % de Fortis Banque, dont il pourrait céder, comme prévu, 75 % à BNP Paribas, sans tenir compte de l’avis des actionnaires. Ce qui serait assez cohérent avec le ton adopté par Didier Reynders, ministre des Finances, qui a toujours refusé de rencontrer les défenseurs des  » petits porteurs « . L’heure semble aujourd’hui – enfin, diront certains – aux négociations avec tous les acteurs en jeu. Lesquels, du coup, adoptent aussi un ton des plus mesurés.

Le Premier ministre Herman Van Rompuy et son vice-Premier ministre en charge des Finances ont reçu une délégation de syndicats du personnel mardi. Le SETCa n’en faisait pas partie. Pourquoi cet  » oubli  » ? Le syndicat socialiste l’attribue au fait qu’il  » reste critique sur chacune des options présentées pour l’avenir : BNP Paribas, banque publique comme aujourd’hui, stand alone, etc.  »

Du côté du holding également, on ouvre désormais grande la porte aux actionnaires. Pour la première fois depuis le début de la  » saga Fortis « , le conseil d’administration a reçu les avocats Mischaël Modrikamen et Olivier Bonhivers, ainsi que Pierre Nothomb (Deminor).  » L’ambiance était extrêmement positive « , a glissé un participant à l’agence Belga. Ces preuves de bonne volonté ont évidemment un objectif : aboutir à un vote positif lors de la prochaine assemblée générale des actionnaires. Et lever l’incertitude qui plane sur Fortis depuis des mois.

BNP Paribas ou stand alone ?

Le temps presse, en effet. Si aucune solution n’est trouvée d’ici au 28 février, date limite de l’offre de BNP Paribas, celle-ci sera déclarée caduque, et l’Etat belge, devenu plein propriétaire de Fortis Banque, devra faire preuve d’imagination. C’est le fameux scénario du stand alone. Est-il le meilleur pour la banque en termes d’emploi ? Les avis sont partagés.

La libérale CGSLB, par exemple, estime que l’option  » d’une banque belge n’offre pas de perspectives favorables. Aura-t-elle les reins suffisamment solides pour résister aux futures crises ? Qui nous dit que l’Etat belge aura, dans six mois, dans un an, la capacité ou l’envie de maintenir cette institution en vie ? Qu’il ne la vendra pas à une entreprise moins sociale, moins complémentaire que BNP Paribas ? »

La socialiste FGTB, à l’inverse, exhorte l’Etat belge à  » saisir l’opportunité de faire de Fortis une banque publique au service de l’intérêt général. Il est essentiel que la banque se concentre désormais sur ses missions fondamentales : collecter l’épargne et accorder des crédits pour investir dans des projets économiques et sociaux qui soutiennent l’emploi, particulièrement mis à rude épreuve « .

De la vente à BNP Paribas ou du stand alone, quelle solution préservera le mieux l’emploi chez Fortis Banque ?  » Nous ne sommes malheureusement pas en mesure de répondre à l’heure actuelle « , répond la direction de Fortis Banque.

Dans le premier cas, on peut notamment craindre la disparition de fonctions centrales en Belgique et des coupes claires dans les rangs de Fortis Banque France (2 000 salariés, contre 18 000 pour la banque en Belgique). Dans le second, des restructurations seront certainement inévitables, même si, souligne Jean-Michel Cappoen, secrétaire général du SETCa,  » il existe depuis 2005 une convention sur les fins de carrière, avec, à la clé, la possibilité de voir partir 500 personnes « . Un  » matelas de sécurité  » qui peut être utilisé pour amortir le choc. Dans un premier temps.

T.S., A.P.

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