Leo Ferré, repris par la scène indépendante. © ANDRE SAS/GETTY IMAGES

Ferré, par la bande

Yves Simon n’est pas le seul à avoir droit à son album hommage. Avec C’est extra, Léo Ferré se voit également remis au goût du jour par la scène indé française. Une démarche audacieuse dans un océan d’albums de reprises qui ne le sont pas toujours autant.

Au même moment qu’Yves Simon, Léo Ferré (1916 – 1993) fait également l’objet d’une relecture par la nouvelle scène française. Intitulée C’est extra, la compilation en question compte treize reprises. Elle partage au moins une ambition avec Génération(s) éperdue(s) : revitaliser un répertoire et lui permettre d’être (re)découvert par les nouvelles générations. En l’occurrence, ce n’est pas la première fois que le poète anar bénéficie de ce genre de réactualisation : en 2003, déjà, Avec Léo proposait des reprises par Dominique A, Alain Bashung, Jacques Higelin, Bernard Lavilliers ou Noir Désir. Quinze ans plus tard, C’est extra propose un casting nettement plus  » underground « . Ou  » souterrain « , en français dans le texte, comme le nom du label/collectif qui a chapeauté le projet : la Souterraine. Depuis 2014, la structure explore la chanson française en délaissant les grandes autoroutes pour se faire ses propres itinéraires bis. Cela se traduit par une série de compilations des groupes peu voire pas connus du tout, aussi invisibles dans les médias traditionnels que sur YouTube si possible…

Jackpot

En matière d’hommage, la Souterraine avait ainsi déjà rassemblé une série d’artistes autour des chansons de Mathieu Boogaerts, en 2016. Mais avec Ferré, il s’agissait de s’attaquer à un véritable monument du patrimoine musical français. Ce sont les éditeurs de son répertoire – les éditions Méridian et La Mémoire et la mer – qui ont contacté la Souterraine. Mathieu Ferré, le fils, commente :  » Léo s’est toujours battu pour ce qu’il pensait être juste, il s’est battu pour la poésie. Aujourd’hui, c’est une nouvelle génération qui se bat pour sa poésie… « . Concrètement, la direction artistique a été confiée à Emile Sornin de Forever Pavot (également présent sur Génération(s) éperdue(s)), Julien Gasc et Benjamin Glibert (du groupe Aquaserge). Régulièrement épatant, le résultat évite en outre les facilités : pas de  » classiques  » comme Avec le temps, C’est extra, ou autre Jolie môme, ce qui participe au charme de l’entreprise. On ne peut pas en dire autant de tous les exercices du genre…

Divers, C'est extra, distr. La Souterraine.
Divers, C’est extra, distr. La Souterraine.

C’est que les albums hommages pullulent. Certes, la démarche n’a rien de neuf. Elle a toutefois tendance à se systématiser, et à occuper de plus en plus de place dans l’actualité musicale. Voire dans les hit-parades. L’an dernier, en France, quand les rappeurs ne squattaient pas les premières places, des disques comme Sardou et nous et La Même Tribu d’Eddy Mitchell jouaient des coudes. C’était avant que ne débarque On a tous quelque chose de Johnny, publié deux semaines à peine avant le décès de l’idole française… Et on ne parle pas des deux volumes de Souchon dans l’air, de Depardieu reprenant Barbara, ou du trompettiste Ibrahim Maalouf s’attaquant à… Dalida, pour ne citer que les exemples les plus récents. A nouveau, l’intention est souvent de réactualiser un patrimoine vieillissant – comme quand Universal demande à la jeune photographe et clippeuse Charlotte Abramow d’imaginer une vidéo hyperpop pour Les Passantes de Brassens. L’occasion, aussi, de surfer sur la nostalgie à moindre frais, en minimisant les risques. En espérant, comme ce fut le cas avec Génération Goldman ou la Bande à Renaud, toucher le jackpot…

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