Elvis en belgovision

Philippe Cornet
Philippe Cornet Journaliste musique

Un faux Elvis pour une vraie chanson : avec le Copycat de Patrick Ouchène, la Belgique a déjà gagné la première place de l’humour sentimental à l’Eurovision 2009.

« J’avais ce projet depuis quelque temps parce que j’ai toujours trouvé que les sosies d’Elvis représentent quelque chose d’extrêmement poétique. Et puis j’ai revu Patrick Ouchène à la télé dans une pub et, du coup, j’ai pensé qu’il pourrait emmener Elvis Presley à l’Eurovision à Moscou, cela donnerait une dimension parfaitement absurde à l’opération.  » Jacques Duvall, auteur bruxellois malicieux (Lio, Chamfort, Birkin) est donc à la source de l’expédition rockabilly à l’Eurovision chantée par Patrick Ouchène. Vu l’acidité naturelle de l’écriture duvallienne, il ne peut s’agir d’un simple pèlerinage revival. Si Copycat présente bien tous les symptômes du morceau rock sans gerçures – voix en écho, mélodie galopante, rythmique féline – le texte ne laisse planer aucun doute sur les intentions très belges de Duvall & C°. Traduit de l’anglais – langue de circonstance – cela donne :  » Là-bas, au bord du Mississippi/Il y a un mec avec une voix qui vibre/Qui conduit la même Cadillac/Qui traque la même bonne étoile/Il est mon sosie/Essaie de me voler mon âme/Mais il est trop gros/Pour le rock’n’roll.  » Ces deux dernières strophes ont mis en émoi les fans du  » vrai King « , mais pas Duvall :  » L’idée, c’est quand même de donner quelque chose au public, ce n’est pas un gag. On le fait tous avec un certain c£ur et on espère vraiment que les gens vont aimer. Je regarde l’Eurovision assez régulièrement et les choix semblent totalement imprévisibles : je n’ai pas encore bien compris en vertu de quoi une chanson l’emporte. On y va la fleur au fusil… « 

Complot de l’Est ?

Fine équipe que celle de Copycat : outre Duvall, elle comprend un compositeur liégeois atypique (Benjamin Schoos, alias Miam Monster Miam), un label de disques indépendant (Team 4 Action) et Patrick Ouchène, auteur du tube Je suis swing avec The Domino’s en 1991. Organisatrice de la sélection, la RTBF a choisi le concept lors d’un  » véritable blind test « d’écoute des candidats, trouvant d’emblée au style rockabilly un authentique potentiel.  » Oui, c’est assez tendance, notamment dans les pays de l’Est … « , explique Jean-Michel Germys, directeur de l’unité de programmes Divertissements-Scènes ertébéens justifiant aussi la présence du Chat de Geluck dans l’affaire :  » Patrick joue de façon quasi fictionnelle l’histoire d’un gars qui chante comme Elvis mais qui ne le connaît pas. Le Chat renforce le surréalisme de l’affaire, partie intégrale de notre belgitude. « La chanson, juteuse, et Ouchène, à l’aise en sosie voulant éclipser le maître, suffiront-ils à qualifier la Belgique ? Dans sa demi-finale, étape obligatoire, elle devra affronter 17 autres pays, dont un solide contingent de l’Est (Roumanie, Macédoine, Monténégro, Belarus, etc.) : assez pour alimenter la rumeur d’une alliance de ces derniers pour voter  » entre eux « . Germys botte en touche, comme il exclut qu’une victoire d’Ouchène embarrasse le service public pour l’organisation d’une Eurovision 2010, au poids financier trop lourd pour la RTBF. Les 20 millions d’euros de dotation de l’UER devraient suffire.

La demi-finale aura lieu le mardi 12 mai à 21 heures sur La Une; la finale, le samedi 16 mai, à la même heure.

PHILIPPE CORNET

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