Du noir au vert

La dépollution et la revalorisation des friches industrielles à Charleroi sont en marche. Engagé de-ci de-là, le travail de reconversion s’annonce de bien longue haleine.

L’assainissement et la réhabilitation des sites d’activité économique désaffectés et autres friches industrielles polluées constituent une lourde tâche. Pas moins de 11 sites carolos s’affichent sur la liste prioritaire, établie dans le cadre du plan Marshall, des 37 sites industriels à dépolluer en Wallonie, sur la base d’une appréciation des risques  » environnement et santé « . A cela s’ajoutent les sites non référencés comme tels mais qui, à terme, font l’objet d’une réaffectation. La motivation est grande, car ces sites présentent un vaste potentiel pour recevoir de nouvelles destinations et réimplanter de nouvelles activités économiques dans le tissu urbain. Mais si, du côté de la ville, les intentions sont définies, certaines lenteurs venues d’ailleurs semblent retarder les processus.

Travaux et blocages

Du côté de la ville, on avance sur plusieurs dossiers, en partenariat avec Igretec et la SPAQuE. C’est le cas du site de la Goudronnerie Robert, trop fortement pollué par les hydrocarbures et appelé à devenir un champ de panneaux voltaïques, ou encore du site des AMS Nord, identifié pour le développement du futur stade de football et d’une zone commerciale et de logement, et qui a besoin d’un assainissement profond, eu égard à son passé de cokerie et de fonderie. D’autres souffrent d’incohérences politiques, tel celui de la Verrerie de la Discipline, à Gilly, un site référencé plan Marshall et donc du ressort du ministre Lutgen, alors que le site attenant de la Corderie Ligny fait partie, lui, des sites répertoriés pour réhabilitation par le ministre Antoine.  » Cela fait un an que nous demandons que les deux sites soient joints pour pratiquer une réaffectation globale, commente l’échevin de l’Aménagement urbain de Charleroi, Eric Massin. De manière générale, nous sommes bloqués sur plusieurs dossiers, car nous attendons que le cabinet Lutgen mette les procédures en route.  » D’autres réaffectations potentielles sont en effet déjà sur le papier, comme celles des fonderies Léonard Giot et de l’ancienne centrale électrique de Marchienne en zones mixtes, la réhabilitation en zone verte des anciennes aciéries Allard, ou encore l’extension de la plate-forme multimodale Charleroi-Châtelet via le site Boma. Meilleures nouvelles, par contre, du côté des sites traités par les opérateurs privés. C’est le cas du train 600 de laminage, occupé auparavant par ArcelorMittal qui a tout remis à zéro en démolissant ses bâtiments. Racheté par Duferco, le site sera assaini par ses soins via sa filiale Duferco Environnement, en vue d’une réaffectation pour de petites activités économiques. Quant à l’ancien site de la cokerie près de Carsid, il est appelé à recevoir toute la filière de traitement durable des scories.

La locomotive Duferco

Le sidérurgiste Duferco fait une entrée remarquée sur le marché de l’environnement avec sa reprise des actifs de Deep Green et sa nouvelle société D2G, dotée désormais d’une technologie avancée dans le secteur du traitement thermique des sols, lui permettant de dépolluer ses propres sites. Désireux de transformer le passif environnemental de ses sites en opportunités, le propriétaire du site de Carsid a ainsi dépensé près de 10 millions d’euros pour réhabiliter 5,5 hectares de friches sur les anciennes installations de la Providence à Marchienne. Dans le respect de dispositions strictes d’exploitation tant du point de vue environnemental, esthétique qu’urbanistique, il est entré dans la première phase de construction d’une centrale électrique TGV d’une puissance de 420 mégawatts, via sa filiale Marcinelle Energie. L’objectif est d’alimenter ses usines belges en énergie et de valoriser les gaz du haut-fourneau (toujours à l’arrêt) et de la potentielle nouvelle (et propre) cokerie. Sa mise en service est prévue pour fin 2010, pour un investissement total de 290 millions d’euros. La cokerie actuelle, fermée depuis début 2008, devrait voir dès le courant de cette année l’arrivée des premières grues de démolition, en partenariat avec la SPAQuE. Si l’implantation de la centrale TGV ne fut pas à proprement parler un coup de c£ur pour les autorités communales, celles-ci semblent avoir fait contre mauvaise fortune bon c£ur.  » C’est un pari sur l’avenir, commente Eric Massin. Nous voulons tirer parti d’une situation qui nous permettra de réhabiliter toute la zone concernée.  » Une autre centrale TGV d’une puissance de 450 mégawatts, prolongée d’une centrale Biomasse, est à l’étude sur un terrain de 15 hectares en bordure de Sambre, à Farciennes, si toutefois un accord parvient à être conclu avec les autorités concernées qui, selon Olivier Waleffe, le  » Monsieur Energie  » de Duferco en Belgique,  » s’inquiètent de l’adéquation du projet avec celui de l’Ecopole « . En attendant, Duferco avance plus loin, du côté de Clabecq, et vient d’obtenir du ministre Antoine un SAR qui lui permet de ne pas rester confiné dans le plan de secteur initial de réaffectation industrielle pure. Cette  » page blanche  » lui permettra de valoriser le site au travers d’un vaste programme immobilier mixte, dès la décontamination par ses soins des 80 hectares. Preuve que Duferco affiche la forte volonté de devenir un conglomérat industriel multipolaire, diversifié à la fois dans la sidérurgie, l’environnement, l’énergie et l’immobilier. A la ville de Charleroi d’en tirer le meilleur parti.

S.D.

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