Droit de réponse

Nous avons reçu ce droit de réponse de Nathalie Foulon, directrice de l’asbl Enfants de l’espoir, après la publication de notre enquête  » Des parents trompés ?  » dans notre numéro du 1er novembre dernier. L’enquête portait sur la plainte déposée par deux familles belges estimant ne pas avoir été correctement informées de l’état médical des enfants marocains qu’elles ont adoptés.

 » Nous n’avons été informés des soucis de santé de la petite fille (Rania) qui a été confiée à la famille Cherkaoui que plusieurs mois après son arrivée en Belgique. Par correction, j’utilise aussi les noms d’emprunt utilisés par les familles, bien que l’asbl soit, elle, directement citée et que je sois moi-même facilement identifiable. Un pédiatre marocain (chirurgien des enfants) consulté par M. et Mme Cherkaoui lors de leur séjour au Maroc a vu l’enfant et leur a confirmé que Rania était en bonne santé.

M. et Mme Cherkaoui m’accusent de leur avoir, via l’organisme, de manière consciente et délibérée, confié un enfant avec un handicap, ce que le titre de l’article sous-entend aussi de façon très accusatrice, voire calomnieuse (en outre, aucun des deux couples n’a porté plainte, contrairement à ce que le sous-titre mentionne). Je n’ai jamais vu cette petite fille ni avant son arrivée en Belgique ni depuis son retour. Je ne vois pas comment je pourrais avoir détecté un problème de santé en étant en Belgique, alors que les documents envoyés par l’institution marocaine ne présentent aucune information attestant d’un problème quel qu’il soit. Je ne suis pas médecin. Le pédiatre marocain qui a suivi l’enfant et qui l’a examiné lors de sa consultation a remis un diagnostic positif à M. et Mme Cherkaoui qui ont alors décidé de poursuivre leur procédure de kaffala de Rania.

Dans la convention qui lie l’organisme d’adoption aux parents adoptants, il n’est nullement convenu qu’un membre de notre organisme doit aller voir l’enfant sur place, au Maroc ni dans d’autre pays d’ailleurs, avant que les parents adoptants ne le rencontrent. Cette convention spécifie que l’organisme n’est pas responsable de la proposition d’enfant faite par le pays d’origine. La famille Cherkaoui a signé ce document et a pris connaissance de cette clause. De plus, il a fallu plus de deux mois d’examens approfondis ici en Belgique pour déterminer qu’il y avait un problème médical, lequel ne semble pas encore clairement connu.

Lors de la procédure d’adoption, les candidats adoptants suivent une formation générale (abstraction faite d’un projet concret d’adoption) imposée par la loi et organisée par l’Autorité Centrale Communautaire. Cette formation, suivie par la famille Cherkaoui, vise notamment à mettre en évidence les différents enjeux de l’adoption, parmi lesquels la malnutrition, le retard dans l’apprentissage de la marche, les maladies endémiques, les mauvaises conditions de grossesse de la mère, mais aussi la  » problématique des dossiers vides « , expression qui vise les problèmes liés à l’absence d’informations sur la naissance des enfants, qui sont parfois trouvés en rue quelques jours seulement après leur naissance.

La famille ne nous a jamais permis de réaliser les suivis de l’enfant, lors de leur retour en Belgique avec l’enfant, et comme cela est prévu dans la convention signée avec notre organisme. M. et Mme Cherkaoui ont également mis notre numéro de téléphone sur liste rouge pour que nous ne puissions plus les contacter. Difficile de les soutenir et de comprendre la situation vécue par les adoptants quand ceux-ci nous somment par écrit de ne plus les contacter autrement que par courrier.

Je regrette, même s’il n’y a rien à cacher, que mes autres activités professionnelles en tant que thérapeute aient été épinglées comme étant douteuses et ce, dans le but de jeter le discrédit sur l’asbl et sur moi-même. Ces activités ne s’adressent pas aux adoptants et se font dans des locaux totalement séparés situés deux niveaux plus bas que les bureaux de l’organisme. Je suis en effet conseillère en fleurs de Bach, aroma-thérapeute, tarologue, comportementaliste félin etc. suite à de nombreuses formations que j’ai suivies auprès de professionnels reconnus en Belgique et à l’étranger et pour lesquelles mes compétences ont été testées et ont donné droit à un certificat, un diplôme ou une agrégation.

Une deuxième famille, Mr et Mme Hilal, disant avoir subi le même préjudice, s’allie à la famille Cherkaoui. Cette famille n’a pas accepté l’enfant qui lui était proposé et a décidé de ne pas le ramener en Belgique. M. et Mme Hilal ont fait un procès à notre organisme et ont été déboutés pour une partie de leurs demandes. Notre organisme a décidé de ne pas faire appel et a versé les sommes prévues par le tribunal. M. et Mme Hilal ont pu adopter très rapidement via un autre organisme un enfant.

Au final, il s’avère que l’enfant refusé par eux a été adopté peu après avoir été rejeté. Le petit garçon a été adopté par une famille marocaine au Maroc (qui l’a donc choisi librement). Il a 8 ans aujourd’hui et selon la directrice de la crèche où il fut accueilli, il se porte très bien et ne présente aucun retard ni physique ni mental.  »

Réaction du Vif/L’Express. Notre enquête faisait état de lacunes dans la procédure d’adoption en Belgique francophone, ce que Nathalie Foulon pointe en fait très précisément : rien n’oblige à ce que l’enfant soit vu, dans son pays d’origine, par l’organisme d’adoption. Mais à la suite de la mésaventure des Cherkaoui, chaque enfant marocain proposé à l’adoption doit être vu par un médecin belge. A la suite du second cas, le ministre a rendu obligatoire la lecture des informations médicales de l’enfant par un médecin belge, depuis la Belgique. Nathalie Foulon affirme que les documents envoyés par l’institution marocaine ne révélaient rien de l’état médical des enfants adoptés. C’est tout le problème : l’administration reconnaît que ces documents sont remplis de manière aléatoire.

Contrairement à ce que Nathalie Foulon affirme, il n’a pas fallu plus de deux mois d’examens approfondis pour diagnostiquer le handicap de Rania. Il a surtout fallu obtenir des rendez-vous auprès de spécialistes. D’ailleurs, son hémiparésie est clairement établie, et mise sur papier. L’argument des  » dossiers vides  » ne veut rien dire dans le cas de Rania : des informations étaient en possession de l’hôpital où elle est née.

Enfin, Madame Foulon affirme que les deux familles n’ont pas porté plainte : c’est faux. Nous possédons le jugement rendu en 2014 qui reconnaît la  » faute « , l' » imprudence  » et la  » négligence  » de l’asbl Enfants de l’espoir, et la requête déposée au tribunal civil de Charleroi par les parents de Rania en mai 2018.

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