Des projets, mais guère de chiffres

Pour Robert Deschamps, spécialiste des finances des entités fédérées aux Facultés de Namur, il faut avoir le courage politique de revoir certaines décisions prises quand la situation budgétaire était plus favorable. Au risque de se rendre impopulaire.

Je ne vois, dans l’accord gouvernemental présenté par l’olivier, pas beaucoup de chiffres « , explique l’économiste. Et pourtant, les chiffres, il faudrait oser les publier, et  » prendre des décisions à caractère budgétaire pour contrer l’explosion de l’endettement et faire de la place pour le financement des projets, qui, eux, sont nombreux dans le texte « . Nous sommes au début de la récession, qui sera grave et longue, prévoit-il, avec un chômage important qui durera longtemps, et une dette publique élevée, assortie de charges d’intérêts élevées.  » Ainsi, à politique inchangée, la Communauté française va voir sa charge annuelle d’intérêts passer de 150 à 300 millions en six ans. « 

Une situation paralysante.  » Si on veut un budget en équilibre en 2015, puisque c’est ce qui est annoncé, on ne retrouvera pas la situation ni les moyens d’aujourd’hui, prédit le professeur, puisque, entre-temps, il y aura eu cette augmentation de la charge de la dette. S’ajoutent à cela les charges du vieillissement de la population et du dérèglement climatique. Nous ne passerons pas entre les gouttes. « 

Alors, il faut prendre le taureau par les cornes, tous faire un effort, et  » supprimer les avantages catégoriels injustifiés, inutiles et contre-productifs « .

Trois exemples avancés par Robert Deschamps

> 1. Il faut rétablir la redevance autoradio. Sa suppression, un  » cadeau  » aux automobilistes, a privé la Région wallonne de 70 millions d’euros de recettes annuelles. Cela représente, en dix ans, intérêts compris, une dette de 800 millions. Les pays voisins, France, Allemagne ou Grande- Bretagne, ont gardé une radioredevance, et Bruxelles aussi ferait mieux de la rétablir. Quant à la Flandre, qui est en bien meilleure position que nous, elle a décidé de limiter aux plus bas revenus le jobkorting, la réduction forfaitaire du précompte professionnel accordée aux personnes qui travaillent et vivent en Flandre. Elle retrouvera ainsi 585 millions.

> 2. Il faut revoir le Fonds des provinces qui représente, en Wallonie, trois fois plus par habitant qu’en Flandre. Cela représenterait une économie de 100 millions par an.

> 3. Il faut mettre fin à la mise en disponibilité des enseignants en fin de carrière. Entre 55 et 60 ans, ils peuvent en effet arrêter de travailler tout en percevant 70 % de leur salaire (payé par la Communauté), et ensuite être pensionnés (à charge du fédéral). Cela concerne aujourd’hui 7 500 enseignants expérimentés et diplômés de l’enseignement supérieur, qui n’accomplissent pas 10 années de leur vie professionnelle (d’où la pénurie de professeurs), et qu’il faut remplacer. On paie donc deux fois pour le même job. Le coût en est élevé, au moins 80 millions par an. Et il ne faut pas se voiler la face :  » La facture des pensions entre 60 et 65 ans nous reviendra immanquablement.  » La solution pourrait passer par une plus grande autonomie de fonctionnement des établissements scolaires.

 » C’est en début de législature qu’il est possible de prendre les décisions nécessaires, même si elles sont impopulaires « , conclut le Pr Deschamps.

ENTRETIEN : MICHEL DELWICHE

 » On paiedeux fois pourle même job « 

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