Un processus révolutionnaire pour créer des organes à la demande. © getty images

Des greffons, en toute transparence

Rosanne Mathot
Rosanne Mathot Journaliste

Comme il ne reste plus guère sur Terre de zones blanches à explorer, les cartographes d’aujourd’hui ambitionnent de fabriquer des atlas en laboratoire, des atlas inédits de l’anatomie humaine. Objectif : disposer de cartes en 3D de nos organes, si détaillées qu’elles permettraient la bioimpression, en urgence et à la demande, de reins, de coeurs ou autres pour sauver la vie de patients en attente d’un greffon.

En Allemagne, on vient de franchir une étape capitale dans le processus, en rendant transparents des organes humains pour en obtenir des images d’une résolution folle. Jusqu’à présent, il était techniquement impossible de bioimprimer des organes artificiels transplantables car leur impression était basée sur des images de tomographie par ordinateur ou réalisées par des appareils IRM, donc pas assez précises. Rappelons que l’année dernière, une équipe de l’université de Tel-Aviv a, pour la première fois, bioimprimé un coeur humain en 3D mais impossible à transplanter en l’état des recherches car à la fois inerte, de la taille d’une cerise et insuffisamment vascularisé.

Désormais, l’équipe menée par Ali Ertürk, directeur de l’Institut d’ingénierie tissulaire et de médecine régénérative de l’Institut Helmholtz, à Munich, affirme disposer d’un triple arsenal, pour pallier cette problématique : la méthode Shanel, pour Small-micelle-mediated Human orgAN Efficient clearing and Labeling.

Dans un premier temps, un solvant rend perméables les organes prélevés sur des cadavres. La perméabilité permet ensuite l’injection d’acide acétique (le principal constituant du vinaigre) et de chlorhydrate de guanidine, un produit qui dénature les protéines. Résultat : l’organe humain devient alors totalement transparent. Une première mondiale qui permettra de mieux en comprendre le fonctionnement cellulaire, moléculaire, neurologique et vasculaire.

A noter qu’en 2013, des chercheurs de l’université américaine de Stanford avaient réussi à rendre transparents des cerveaux de souris, mais butaient sur les spécificités des organes humains. Cet écueil aurait été surmonté par l’équipe munichoise, qui possède deux flèches supplémentaires à son arc : d’une part, la mise au point d’un innovant  » ultramicroscope à balayage  » et, de l’autre, la création d’algorithmes de Deep Learning – une classe d’algorithmes d’apprentissage automatique que l’on retrouve notamment dans la reconnaissance vocale de l’assistant Siri d’Apple ou dans le tagging de morceaux de musique de l’appli Shazam. Les tests sur des animaux sont prévus dans un an. S’ils sont concluants, l’équipe d’Ali Ertürk mise sur des tests cliniques humains dans les prochaines années. Premiers organes en ligne de mire : le pancréas et le rein.

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