Des Américains plus tolérants

Les frasques sexuelles des élus engendrent moinsde scandales… et de démissions !

DE NOTRE CORRESPONDANT

Son épouse et ses collaborateurs le croyaient à l’assaut des rudes sentiers de randonnée des Appalaches. Quelle ne fut pas leur surprise en découvrant, le 24 juin, à l’ouverture des journaux télévisés, que Mark Sanford, gouverneur républicain de Caroline du Sud, avait, en fait, passé une semaine incognito à Buenos Aires avec sa maîtresse argentine ! Vingt ans plus tôt, un élu américain pris en flagrant délit d’infidélité aurait vu sa carrière arrêtée net au premier coup de clairon des médias. Or Mark Sanford entend bien achever son mandat au motif qu’il n’a rien commis d’illégal – il a bien payé de sa poche son escapade. Le puritanisme américain, grand fossoyeur des destins politiques, appartiendrait-il à l’histoire ?

Certaines affaires récentes confirment, en tout cas, une indulgence nouvelle. Le même mois, un autre républicain, le sénateur John Ensign, reconnaissait sa liaison avec une collaboratrice, sans pour autant démissionner. David Vitter, élu de Louisiane, identifié en 2007 sur la liste des habitués d’une maison close de Washington, brigue, lui, sans vergogne, sa réélection en 2010.

 » Les scandales frappent aussi bien les démocrates que les républicains, et les deux partis hésitent désormais à recourir à cet argument contre leurs adversaires, constate Darrell West, politologue à la Brookings Institution. De plus, la succession d’affaires depuis les années 1990 a fini par désensibiliser le public. Enfin, cette mansuétude témoigne du virage de l’opinion, plus tolérante sur les questions de m£urs.  » L’exemple type de cette évolution, pour Darrell West, est celui de Barney Frank, influent représentant du Massachusetts au Congrès, ouvertement gay et réélu depuis vingt ans malgré des déballages embarrassants, comme la révélation qu’un jeune prostitué, devenu son employé de maison, continuait à contacter ses clients depuis le domicile de son protecteur…

Pas de pardon, toutefois, pour les hypocrites. Larry Craig, sénateur de l’Idaho, opposant acharné aux droits des homosexuels, a dû renoncer à son siège après son arrestation, en 2007 dans les toilettes de l’aéroport de Minneapolis, où il avait fait des avances à un policier en civil. De même, Eliot Spitzer, gouverneur de l’Etat de New York, réputé inflexible sur les questions d’éthique, a dû démissionner en mars 2008 : il était client assidu d’une call-girl membre d’un réseau illégal de prostitution. l

PHILIPPE COSTE

 » la succession d’affaires a fini par désensibiliser les gens « 

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