Christian Dupont  » J’assume l’échec du décret Mixité « 

A six mois des élections, Christian Dupont jette l’éponge. Face à la colère des parents, le ministre PS de l’Enseignement enterre le tirage au sort censé départager les élèves  » excédentaires « . Mais rien ne change pour septembre 2009.

Finalement, vous reconnaissez que le critère du tirage au sort pour départager les demandes d’inscription trop nombreuses dans une centaine d’écoles n’était pas le bon !

La simple honnêteté me conduit à admettre que le critère aléatoire, qu’on appelle loterie, ne fonctionne pas. Le processus en cours doit être maintenu pour la rentrée 2009, mais le système est grillé pour l’avenir.

Près d’une centaine d’écoles de la Communauté française ont dû procéder à un tirage au sort, faute de places en nombre suffisant. Vous ne vous êtes pas douté, quand vous avez conçu le décret, qu’il provoquerait des inscriptions multiples ?

Je n’avais pas imaginé une telle panique, un tel gonflement des inscriptions. En fait, je n’ai jamais été un chaud partisan des critères aléatoires. Le texte initial, conçu après l’échec du décret Arena, laissait les chefs d’établissement autonomes pour organiser le tri des élèves inscrits. Mais le Conseil d’Etat a recalé notre projet. J’ai été forcé d’instaurer les critères contestés.

Des parents dénoncent l’amateurisme de ceux qui ont élaboré le décret. Ils estiment que l’on a créé des problèmes là où il n’y en avait pas.

Notre travail n’était pas improvisé. Le texte, qui vise à une plus grande mixité sociale, a été longuement discuté avec les associations concernées. On est allé à l’étranger pour s’inspirer d’autres modèles. Tout s’est bien déroulé lors des inscriptions, sauf dans 95 écoles, quasi les mêmes que celles où, suite au décret Arena, il y a eu des files de parents en novembre 2007.

Une évaluation du décret était prévue au début de l’an prochain. Pourquoi avoir annoncé, dès cette semaine, l’abandon programmé du décret, alors que le processus d’inscription n’est pas achevé ?

Je veux ramener la sérénité dans les écoles.

Et éviter de vous mettre à dos nombre d’électeurs alors que la campagne pour les régionales commence ?

L’inquiétude actuelle donne de l’école une image que je n’aime pas. Même si le décret Mixité est une £uvre collective, j’assume cet échec. J’aimerais que d’autres en fassent autant.

Joëlle Milquet réclame la mort du décret. Les pressions du CDH vous ont-elles poussé à agir en ce sens ?

Nos sorties n’étaient pas concertées. Joëlle Milquet et moi avons simplement tenu compte de la réaction du terrain.

Pour la rentrée de septembre 2010, allez-vous retenir le critère de la  » proximité géographique « , que vous trouvez  » tentant  » ?

J’aurai plus de temps pour préparer ce nouveau décret. Le critère de proximité suggéré par des associations de parents me semble intéressant, mais vous voyez qu’il provoque déjà des réactions négatives.

La Flandre a retenu le principe du  » premier arrivé, premier inscrit « . Pourquoi y a-t-il eu moins de récriminations qu’à Bruxelles et en Wallonie ?

En Flandre, les inscriptions ne se font pas toutes au même moment. Mais ce système primitif de files a, dans certains cas, des résultats catastrophiques. Les Flamands envisagent de le remettre en cause.

Toute réforme scolaire semble provoquer une levée de boucliers, parmi les syndicats d’enseignants ou auprès des parents d’élèves. Etes-vous condamné à l’immobilisme ?

Des dossiers ont tout de même avancé : la formation continue, l’encadrement différencié, l’introduction du test scolaire à la fin du secondaireà Pour le reste, il n’est pas facile de bousculer les mentalités.

Que dites-vous aux parents inquiets, dont l’enfant n’a pas été retenu par tirage au sort ?

Les écoles vont demander aux parents dont les enfants sont acceptés de confirmer leur choix. La bulle des multi-inscriptions va alors se dégonfler.

Entretien : Olivier Rogeau

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