Charleroi, haut lieu de l’art actuel

Guy Gilsoul Journaliste

A Charleroi, le BPS 22 sera bientôt le plus grand espace d’art contemporain de Wallonie. Le résultat d’un travail dynamique et engagé de son capitaine, Pierre Olivier Rollin.

En 2001, Laurent Busine quittait le palais des Beaux-Arts de Charleroi pour prendre la direction du tout nouveau Mac’s, au Grand-Hornu, laissant dans la ville un vide à combler, et une place à prendre, d’autant que la très riche collection d’art acquise par la Province du Hainaut n’avait pas de lieu où s’exposer et que le Mac’s n’en voulait pas.

A peine sorti de l’université, Pierre Olivier Rollin (né en 1970) s’était fait remarquer pour son dynamisme, sa volonté et ses idées de gauche. Très vite intégré au milieu socialiste wallon, il prend en 2000 la succession de Xavier Canonne au poste de chef du secteur des arts plastiques de la Province du Hainaut et devient, de ce fait, responsable de plus de 6 000 £uvres acquises depuis la fin du xixe siècle. Radicalisant le propos sur la culture et ses rapports avec les jeunes, il orga-nise, la même année, une première exposition de celles-ci dans un espace abandonné, le Bâtiment provincial Solvay (BPS).

Le lieu, rebaptisé BPS 22, est un symbole fort du socialisme à Charleroi. C’est là en effet, entre les murs de cette architecture de fer et de verre construite en 1911 pour accueillir l’exposition industrielle et commerciale, que Paul Pastur, un député provincial disciple de Jules Destrée, imagine en 1921 une Université du Travail. Soit, à l’heure des luttes pour l’émancipation ouvrière et des premiers loisirs, un lieu où s’instruire et se rencontrer hors des usines et des bistrots. On y apprend les métiers de la construction, mais aussi ceux de la cuisine, la couture, la boulangerie, la chimie ou le commerce. Il accueille aussi des clubs d’horticulture, de colombophilie, une piscine, un théâtre et une salle d’exposition où le  » réalisme social  » sera de mise. Tout va pour le mieux, jusqu’à la crise industrielle des années 1960. L’université tombe alors en désuétude, le quartier devient ghetto. En 1986, via la volonté d’un député permanent, Pierre Dupont, la Province qui avait renoncé à tout achat renoue avec un budget d’acquisition d’£uvres d’art (aujourd’hui de 200 000 euros). Mais que faire de ce patrimoine ?

Quatorze ans plus tard, Pierre Olivier Rollin, sitôt nommé, se charge de redéfinir les priorités. Côté politique d’achat, il décide de privilégier ce qui est  » jeune  » et politiquement engagé, tout en accordant une attention particulière au surréalisme (dont le Hainaut fut un terreau, mais négligé dans le passé). Côté programmation, il investit de façon plus radicale le BPS et opte pour des expositions au profil ciblé, cocktail habile où se mêlent les stars d’ailleurs et les  » locaux « , autour de questions d’actualité ayant souvent une saveur de critique des pouvoirs. Grâce à des partenariats avec les institutions les plus en vue à Zürich, Lyon, Paris, Lu-xembourg mais aussi en Belgique (le Muhka, le Smak, Bozar), il accentue la visibilité internationale du BPS 22.Au point de vue local, se souvenant de ses débuts comme travailleur social, il développe les relations avec les associations de quartier, mais aussi avec les écoles de la Province selon des méthodes inédites en faisant confiance à son public cible, les jeunes. Résultat : une reconnaissance grandissante qui, aujourd’hui, conduit le BPS vers de nouveaux projets. Parmi eux, l’extension et la rénovation des espaces qui, sous la conduite de l’archiscénographe Philip Roland, passera de 1 200 à 4 400 mètres carrés, dont 2 500 pour les expositions. Coût : 3,5 millions d’euros, dont 70 % sera payé par la Communauté française. Pierre Olivier Rollin devient ainsi le manager du plus grand musée d’art contemporain de Wallonie… Début des travaux : début 2010. Ouverture en fanfare prévue un an plus tard. On croise les doigts.

BPS22, 22, boulevard Solvay, à Charleroi ; http://bps22.hainaut.be

Guy Gilsoul

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire