3) Consommer local

Soraya Ghali
Soraya Ghali Journaliste au Vif

Les adeptes du manger-local sont en lien direct avec les producteurs du cru, pour réduire leur empreinte écologique et obtenir des prix serrés. La formule séduit.

En cette saison de crises économique et écologique, le groupe d’achats communs, ça pousse comme des champignons après la pluie. Un GAC, dit-on entre initiés. Pour remplir le cabas familial, des ménages achètent ensemble les denrées de base directement aux agriculteurs et aux artisans régionaux, de préférence bio. Ils négocient un contrat avec un maraîcher, s’engageant à lui prendre une partie de sa récolte. Au final, le fermier est sûr de vendre très rapidement et sans perte. Le  » locavore « , lui, achète des produits de qualité et de saison à un prix fixe et correct – puisque sans intermédiaires. C’est la logique du circuit court.

Pour les  » gaqueurs « , réduire la distance parcourue par l’aliment a des répercussions. Ecologiques, en premier lieu : on diminue fortement son empreinte carbone en n’achetant ni fruits ni légumes importés par avion et par camion. Economiques : on soutient le commerce local et on encourage une agriculture rurale. Gustatives aussi : on lutte contre la standardisation du goût. Qui leur donnerait tort ? Ils ont néanmoins leurs détracteurs. Là où la bataille fait rage, c’est sur le terrain de la solidarité avec le Sud. En consommant local, le Nord appauvrit juste un peu plus le Sud. Au contraire, répond Marc Fischer, secrétaire général chez Nature et Progrès,  » en n’important plus des produits cultivés uniquement pour nous, à terme, les pays du Sud pourraient remettre en place des cultures vivrières « .

Mais l’autosuffisance n’est pas pour demain. Pour nourrir le pays en fruits et légumes, avancent les gaqueurs, il faudrait 45 000 entreprises maraîchères. On en compte… 2 900. Autre faiblesse : nos agriculteurs ne sont pas des distributeurs ; ils restent peu structurés. Conséquence : la facture économique (ce que vous payez) et écologique (c’est l’agriculteur qui livre les denrées) peut plomber le prix du cabas.

 » Ce n’est pas une mode légère « 

Dans un contexte économique plutôt morose, les groupes d’achats aiguisent l’appétit de plus en plus de consommateurs. En particulier les citadins : à Bruxelles, en moins de deux ans, leur nombre est passé de 3 à une douzaine, et 5 sont en création. Sans compter les candidats qui poireautent sur des listes d’attente. Surtout, avec le renchérissement des denrées, dû au prix du baril (qui alourdit le coût du transport) et à la monoculture intensive (fort dépendante du pétrole), la cherté de l’or noir joue en faveur du manger-local : à long terme, ça finira par être réellement moins cher.

 » Manger local n’est pas une mode légère mais une tendance de fond : les gens veulent acheter un produit qui fait sens « , observe Erik Mathijs, professeur d’économie à la KULeuven. Petits malins, attention, on ne rejoint pas un GAC avec en tête l’idée de profiter de prix plus corrects. Adhérer à la tribu est un choix de consommation, érigé en valeur, et exige de l’investissement.  » Ce qui est recherché, c’est d’abord un retour à l’humain. Il ne s’agit donc pas de venir acheter son panier bio et de repartir. « 

Infos : www.natpro.be ; www.gas-bxl.collectifs.net/

Soraya Ghali

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