Carte blanche

Yes, we Hillary

 » Des millions de personnes vous trouvent menaçante, pourquoi être ainsi une sorte de paratonnerre ?  » ou encore  » Qu’est-ce que vous pensez de la comparaison à Lady Macbeth ?  » Ce ne sont là que quelques questions honteuses qu’a dû affronter Hillary Rodham-Clinton ces dernières décennies.

Aucune autre femme dans l’histoire ne s’est vue poser tant de bêtes questions sur sa façon de rire, son apparence, sa maternité, son rôle de Première Dame et son mari.

Et pourtant. Malgré un sexisme omniprésent, elle a récolté 16 millions (!) de voix aux primaires et elle est la première candidate à la présidentielle pour le compte d’un des deux partis principaux. Rodham-Clinton n’est évidemment pas de personnalité terne. Si cela avait été le cas, elle n’aurait par ailleurs jamais pu se présenter en tant que candidate à la présidentielle. Quiconque souhaite se présenter à la plus haute fonction des États-Unis a besoin d’une machinerie bien huilée, d’un trésor de guerre, d’alliés et d’un C.V. démontrant une très longue présence dans les hautes sphères de la politique. Celle-ci est inévitablement en partie teintée de décisions discutables, telles que ses discours chers aux banques de Wall Street ou son attitude ambiguë à l’égard de l’Arabie-Saoudite.

Face à cela, il convient de noter son engagement en faveur de la santé de l’Américain lambda depuis des décennies déjà, accompagné d’une proposition approfondie et ambitieuse émise dans les années 90 (bien avant Obamacare) en faveur d’une couverture santé universelle, la création du State Children’s Health Insurance Program pour les parents qui n’ont pas eu les moyens de payer une couverture maladie à leurs enfants, et son combat contre les violences à l’égard des femmes (elle a contribué à cet effet à la création d’un département spécifique au sein de la Justice).

En tant que ministre des Affaires étrangères, elle a également initié une résolution des Nations unies visant à lutter contre les violences à l’égard des femmes dans les zones de conflits et a lancé Global Health Initiative, permettant aux Nations unies d’investir 63 milliards de dollars dans les pays partenaires, en vue de proposer des services liés à la santé plus performants pour les mères et les enfants.

Aucune autre femme qu’Hillary Clinton dans l’histoire ne s’est vue poser tant de bêtes questions sur sa façon de rire, son apparence, sa maternité, son rôle de Première Dame et son mari.

En 1995, le discours historique « Women’s rights are human rights » (« Les droits des femmes sont des droits de l’Homme ») qu’elle a tenu à Pékin continue toujours d’inspirer de nombreuses femmes dans le monde, en ce compris nous-mêmes, dans leurs actes et leurs paroles. Il n’est donc pas surprenant que son programme plaide aujourd’hui pour des congés de maternité payés et une augmentation du salaire minimum. Un nombre important et disproportionné de femmes travaillent pour 7,25 dollars de l’heure alors qu’elles pourraient atteindre les 12 dollars. Il s’agit là d’une absolue nécessité, étant donné que le salaire moyen aux États-Unis stagne depuis des dizaines d’années et que de nombreux Américains ne parviennent plus à s’en sortir avec un seul job.

Pourquoi donc la course à la Maison Blanche est-elle si « tendue » entre Hillary et Trump qui est la testostérone personnifiée, qui est soutenu par le Klu Klux Klan, qui défend la prolifération nucléaire et qui refuse de confirmer qu’il acceptera les résultats des élections ? Pourquoi les femmes de pouvoir effraient-elles et les hommes de pouvoir jouissent-ils d’une autorité certaine ? Les femmes qui s’affichent sur la scène publique font encore et toujours l’objet de nombreux préjugés. Comme Tessa Ditonton, assistante-professeur en sciences politiques à l’Université publique de l’Iowa le confirme, les femmes doivent être deux fois plus compétentes pour atteindre deux fois moins que les hommes, et leurs fautes sont jugées plus sévèrement. Comme l’humoriste américain, Bill Burr, l’a souligné par le passé : « Je suis d’accord avec 90 % des principes du féminisme. Pour autant que ce ne soit une femme qui me les affirme ».

Ceci est encore plus frappant selon une étude sur les programmes numériques. Ceux qui sont élaborés par des programmeurs féminins reçoivent une évaluation plus positive que ceux élaborés par leurs collègues masculins. Sauf si l’on affirme aux personnes interrogées que ce sont des femmes qui ont conçu le programme. Dans ce cas, ces personnes estiment qu’il est de moindre qualité. Quant aux femmes qui aiment remporter des victoires, telles que Olga Leyers et Danira Bouhkriss-Terkessidis dans l’émission télévisée flamande « De Slimste Mens » ? Elles sont considérées comme de petites garces arrogantes.

À l’instar de tous les responsables politiques, Hillary Rodham-Clinton a sans nul doute commis des erreurs. Elle en fera probablement encore. Toutefois, qu’elle gagne ou qu’elle perde – nous espérons évidemment qu’elle gagne – elle restera une source d’inspiration pour tous ces hommes et ces femmes qui s’engagent à travers le monde en faveur de plus d’égalité des chances, ainsi que la promesse d’un rendement davantage social qui en découle.

BIANCA DEBAETS (Secrétaire d’État à l’Égalité des Chances) & ELS VAN HOOF (présidente de l’ASBL Vrouw & Maatschappij)

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