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Valls parvient à s’inscrire dans le sillage de Macron

Le Vif

Après deux jours de suspense sur son avenir, l’ancien Premier ministre socialiste Manuel Valls, en rupture de banc avec son parti, est parvenu à nouer un premier rapprochement avec le président élu Emmanuel Macron, malgré les tensions entre les deux hommes.

« On ne claque pas la porte au nez à un ancien Premier ministre qui nous dit ‘j’ai envie de vous rejoindre et être utile' », a justifié jeudi le secrétaire général du mouvement présidentiel, La République en Marche (LREM), Richard Ferrand, lors d’une conférence de presse.

Manuel Valls, 54 ans, avait suscité agacement et embarras au sein du mouvement présidentiel en se rangeant d’autorité mardi sous la bannière du président élu, en vue des élections législatives des 11 et 18 juin.

« Ce parti socialiste est mort » et « je serai candidat de la majorité présidentielle », avait-il lancé sur une radio, s’attirant les foudres du PS et des menaces d’exclusion.

Cette offre, présentée comme un fait acquis, avait été aussi très fraîchement accueillie dans l’entourage d’Emmanuel Macron, peu enthousiasmé par le ralliement d’un homme détesté par une bonne partie de la gauche.

Cette candidature ne remplit pas « à ce jour » les conditions requises, avait répliqué le patron de la commission d’investitures de LREM.

Pris en étau entre sa promesse de renouvellement politique et son souci de bâtir une majorité – cruciale pour gouverner – le camp d’Emmanuel Macron a trouvé la parade, après 48 heures de réflexion.

« Aucun candidat ne peut être investi s’il a déjà fait trois mandats de parlementaire », a expliqué M. Ferrand. « Mais nous ne voulons pas donner l’impression d’humilier (…). A ce stade nous n’investissons pas l’intéressé mais nous ne lui opposons pas de candidat » dans son fief d’Evry, au sud de Paris.

Signe de l’éclatement du parti socialiste, accéléré par l’arrivée à l’Elysée du centriste de 39 ans, entre 80 et 100 députés PS sortants ont – comme Manuel Valls – sollicité l’investiture du mouvement présidentiel.

Seulement une vingtaine l’ont obtenue jeudi, mais quelque 150 candidats LREM restent à désigner d’ici la semaine prochaine.

Humiliation

Le rapprochement opéré par Manuel Valls constitue le dernier rebondissement d’un feuilleton de trois ans de rivalité croissante entre les deux hommes, qui ne se sont pas parlé depuis des mois.

Lorsqu’il était Premier ministre, Manuel Valls a longtemps été exaspéré par les vélléités d’autonomie de son jeune ministre de l’Economie qu’il a plusieurs fois recadré publiquement.

Les relations entre Emmanuel Macron et son ancien patron au gouvernement sont notoirement « exécrables », rappelle Rémi Lefebvre, professeur de Science politique à l’Université de Lille (nord).

S’ils affichent des idées proches – notamment au plan économique où ils se rejoignent sur une vision sociale-libérale – les deux hommes se sont heurtés au sein du gouvernement (2014-2016).

« Manuel Valls a été d’une très grande violence à l’égard d’Emmanuel Macron, il l’a humilié à plusieurs reprises », souligne Rémi Lefebvre.

La guerre ouverte entre ces ambitions rivales a culminé lors de l’adoption de la loi dite Macron, à l’été 2015. Le ministre de l’Economie, qui avait bataillé des centaines d’heures pour convaincre les députés de voter son texte destiné à libéraliser certains secteurs de l’économie, s’est vu couper l’herbe sous le pied par le premier ministre qui a opté pour un passage en force très mal vu dans l’opinion publique.

En avril 2016, Manuel Valls lance – devant les caméras de l’Assemblée nationale – un retentissant « c’est inacceptable, c’est inacceptable! » à Emmanuel Macron, qui vient de lancer son propre mouvement et affiche son désir de s’émanciper du gouvernement.

Rêvant de remplacer à l’Elysée l’impopulaire François Hollande, Manuel Valls avait démissionné le 6 décembre 2016 juste après l’annonce du renoncement du président. Cet acte de candidature lui avait valu d’être surnommé « Brutus » par ses adversaires.

Il espérait défier au nom du parti socialiste Emmanuel Macron, parti dans la course à la présidentielle sur un projet « ni de droite ni de gauche » après avoir claqué la porte du gouvernement.

Mais sa défaite sans appel au second tour de la primaire socialiste face à Benoît Hamon, un frondeur venu de l’aile gauche du PS, a sonné le glas de ses rêves de présidence et l’amorce de son ralliement à Emmanuel Macron.

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