Manifestation pour un contrôle plus strict des armes à feu aux Etats-Unis, à Washington le 14 mars 2018. © REUTERS

USA: la « Génération Columbine » se mobilise contre les armes à feu

Olivia Lepropre
Olivia Lepropre Journaliste au Vif

Une mobilisation citoyenne contre les armes à feu aura lieu samedi à Washington. Elle est initiée par les survivants de la fusillade du lycée de Parkland en Floride. Leur message :  » plus jamais ça « .

Cela devrait être le plus grand rassemblement contre les armes à feu de l’histoire des Etats-Unis. Baptisé « March for Our Lives », il aura lieu ce samedi à Washington. Selon le site internet de l’organisation, plus de 830 marches parallèles se tiendront sur tout le territoire américain, où les armes font plus de 30.000 morts par an.

L’évènement national est une réaction à la fusillade qui a eu lieu le 14 février dernier et qui a fait 17 victimes dans un lycée de Floride. Cet énième drame a choqué les Américains et exaspéré une bonne partie d’entre eux.

« Cela fait 36 jours et rien ne se passe »

La manifestation géante a pris ces cinq dernières semaines une ampleur croissante dans son organisation, recueillant notamment l’appui de nombreuses célébrités. Mais les visages du rassemblement seront les jeunes qui s’identifient comme « survivants », les rescapés du lycée de Parkland. Ces jeunes étaient déjà présents jeudi au Congrès pour exposer leur ressenti des évènements et leurs souhaits pour les Etats-Unis, notamment en ce qui concerne le contrôle des armes à feu.

Aalayah Eastmond a fait le voyage jusqu’à Washington en hommage à ses copains tués et blessés : « J’ai perdu deux amis dans ma classe et six autres ont été touchés », a-t-elle relaté devant le Congrès. « Il faut agir. Cela ne peut plus se reproduire. Cela fait déjà 36 jours et rien ne se passe. Nous devons bouger vite. Cette marche n’est qu’un début. On se battra jusqu’à ce que cela change », a-t-elle affirmé avec détermination.

Agir, ou risquer de « tuer l’avenir de l’Amérique », ont scandé ces étudiants devant le Congrès. Ils exhortent les élus à enfin répondre à leurs appels et à adopter des lois plus strictes sur le port des armes à feu et leur utilisation aux Etats-Unis. « Nous n’essayons pas de vous enlever vos armes. Nous essayons de récupérer nos vies », a ajouté David Hogg. « Ce n’est pas un problème Démocrate. Ce n’est pas un problème Républicain. C’est un problème américain ».

Leur marche est considérée comme l’un des mouvements sociaux les plus importants de ces dernières années aux Etats-Unis. Le Time de cette semaine consacre d’ailleurs sa couverture à ces « survivants », très médiatisés, moteur de la mobilisation, avec un titre évocateur : « Enough. »

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Génération Columbine

La jeune génération américaine est parfois considérée comme la « School shooting generation » ou la « génération Columbine », du nom de l’école secondaire du Colorado où deux élèves ont tué 12 de leurs camarades de classe et un professeur en 1999. Selon une analyse du Washington Post, plus de 187.000 élèves américains de primaire et de secondaire ont été témoins d’une fusillade à l’heure des cours depuis cet évènement.

Une enquête USA Today/Ipsos publiée cette semaine révèle que, pour la génération qui a grandi dans l’ombre du massacre de Columbine, la menace des fusillades de masse est l’une de leurs plus grandes craintes. Selon ce sondage réalisé auprès de 600 jeunes âgés de 13 à 24 ans, 20% disent ne pas se sentir en sécurité dans leur environnement scolaire. Un quart d’entre eux pense par ailleurs qu’il est probable qu’un camarade de classe amène un jour une arme à l’école.

Ces jeunes ont vécu la totalité de leur scolarité avec cette menace permanente, unique aux Etats-Unis, d’être potentiellement victimes des balles d’un déséquilibré. Ils ont également dû prendre part à d’innombrables exercices d’urgence pour se confiner en cas de tirs. Et ils ont connu la frustration de voir leurs élus faire la sourde oreille ou leur président proposer récemment d’armer leurs enseignants.

« Réveil de la nation »

Ayant connu un échec cuisant sur le sujet après la tuerie de Sandy Hook en 2012, l’ancien président Barack Obama a jeté son poids derrière la « March for Our Lives », en adressant une lettre aux lycéens de Parkland : « Vous avez favorisé le réveil de la nation. »

Les réseaux sociaux ont également permis que le sujet ne tombe pas dans l’oubli, avec des hashtags consacrés comme #Enough ou #NeverAgain.

Le sénateur républicain de Floride, qui a affronté récemment les étudiants lors d’un débat télévisé, a également tenu à les féliciter pour leur engagement et leur action. « Ils en ont fait davantage en cinq semaines que cela a été fait en 15 ans », a-t-il confié au Guardian. Il met cependant en garde contre le risque de créer des « attentes irréalistes » pour qu’au final « rien ne se passe ».

Un adversaire de taille

La mobilisation après les tueries de masse n’est généralement que de courte durée. Mais les jeunes persistent et ne comptent, cette fois, pas lâcher l’affaire contre un pouvoir exécutif et législatif qu’ils accusent de prendre la tangente sur le sujet du port d’armes, second amendement des Etats-Unis cher à beaucoup de citoyens et politiciens.

Mais face à eux, sans relâche depuis le drame, se dresse un adversaire de taille : la National Rifle Association (NRA), le lobby des armes aux USA. Il est difficile aujourd’hui de prédire si leur mobilisation et le soutien populaire dont ils bénéficient seront suffisants pour faire bouger les lignes.

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