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Tunisie: faible participation aux premières municipales libres

Les premières municipales libres de Tunisie ont été marquées par une forte abstention dimanche, les Tunisiens se disant démobilisés par les difficultés économiques et politiques, lors d’un vote jugé crucial pour enraciner la démocratie dans l’unique pays rescapé du Printemps arabe.

Le taux de participation à ce scrutin proportionnel à un tour, qui s’est déroulé sans incident majeur, n’a atteint que 33,7% au niveau national, et seulement 26% à Tunis, selon l’instance en charge des élections, l’Isie. « Le plus important pour nous, c’est que les élections municipales ont eu lieu, c’est un moment historique pour la Tunisie », a déclaré à l’AFP Mohamed Tlili Mansri, président de l’Isie. Pour l’abstention, « nous ferons mieux la prochaine fois ». « Ce haut taux d’abstention signifie que les partis sont faibles », estimait pour sa part l’analyste politique Youssef Cherif. « Ces dernières années, ils se sont livrés à des combines entre politiciens sans programme d’envergure, et cela n’intéresse pas les citoyens ».

Un institut de sondage a donné le parti islamiste Ennahdha légèrement en tête (25%) talonné par le parti présidentiel Nidaa Tounès (22%), loin devant les autres formations. Mais l’Isie, qui ne donnera ses résultats que dans les jours à venir, ne confirme pas ces chiffres.

Un responsable de Nidaa Tounès a reconnu que son parti était deuxième, et selon un député d’Ennahdha, les premières tendances confirment que son parti était en tête, notamment pour la mairie de Tunis. « C’est une victoire pour Ennahdha et Nidaa ainsi que pour l’équilibre démocratique », a estimé le porte-parole Imed Khemiri, se réjouissant de la poursuite des alliances forgées entre eux au niveau national, tout en invitant à « étudier les raisons de l’abstention ».

Dans la capitale, la candidate Ennahdha, Souad Abderrahim, une pharmacienne de 53 ans, ancienne député constituante et vitrine du parti, pourrait devenir la première femme maire de Tunis, selon les sondages. Sept ans après la révolution, qui avait suscité de nombreux espoirs, beaucoup de Tunisiens se disent déçus en raison d’une situation économique difficile, avec une inflation proche des 8% et un chômage persistant au-dessus des 15%. Ils rejettent aussi les « arrangements » entre partis, aux premiers rangs desquels l’alliance entre Nidaa Tounès et Ennahdha.

Le Premier ministre Youssef Chahed a pris acte de cette abstention, estimant que c’était « un signe négatif, un message fort (…) pour les responsables politiques ». Les jeunes étaient particulièrement peu nombreux à voter, selon les observateurs.

Repoussées à quatre reprises, ces municipales constituaient les premières élections depuis les législatives et la présidentielle de 2014, alors saluées par la communauté internationale. Ce scrutin constitue « un pas important pour la stabilité du pays, pour la mise en place complète de la Constitution et pour servir de modèle au monde arabe », a estimé le vice-président du Parlement européen, Fabio Castaldo, chef des observateurs envoyés par l’UE.

Les 5,3 millions d’électeurs tunisiens inscrits ont voté pour les conseillers des 350 municipalités, parmi 57.000 candidats. Ces conseillers devront ensuite élire les maires d’ici la mi-juin. Ce scrutin sera suivi de législatives et d’une présidentielle en 2019.

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