Donald Trump © AFP

Trump cède et ordonne une enquête du FBI sur Kavanaugh

Le Vif

Sous la pression grandissante y compris des républicains, Donald Trump a ordonné l’ouverture d’une enquête du FBI sur son candidat à la Cour suprême, accusé d’agressions sexuelles, repoussant de fait le vote très attendu au Sénat américain sur la confirmation de Brett Kavanaugh.

Le magistrat autour duquel s’est cristallisée une intense controverse cette semaine a indiqué accepter de coopérer.

Cette décision a clos une journée d’intense bras de fer et de rebondissements au Capitole autour de la confirmation du juge Kavanaugh, 53 ans, et laisse planer l’incertitude sur son accession à la plus haute juridiction du pays.

« J’ai ordonné au FBI de mener une enquête complémentaire » sur M. Kavanaugh qui ne devra pas prendre plus d’une semaine, a déclaré vendredi Donald Trump dans un communiqué. Il avait plus tôt de nouveau assuré Brett Kavanaugh de son soutien.

Le président américain a tweeté dans la soirée pour préciser que l’enquête venait tout juste de commencer.

Brett Kavanaugh « sera un jour ou l’autre reconnu comme un vraiment formidable Juge de la Cour Suprême des Etats-Unis », a écrit M. Trump.

Debra Katz, l’un des avocats de Christine Blasey Ford, 51 ans, qui affirme que M. Kavanaugh a tenté de la violer lorsqu’ils étaient lycéens, a estimé qu' »aucune limite artificielle, tant du point de vue du temps que de l’ampleur ne devait être imposée » à l’enquête du FBI, selon des médias américains.

Les investigations seront « limitées aux accusations plausibles » portées contre le juge conservateur, a néanmoins précisé la commission judiciaire du Sénat.

Les démocrates demandaient depuis des jours une enquête du FBI.

Au cours de son enquête, la police fédérale américaine aura la possibilité d’interroger Mark Judge, l’ami de Brett Kavanaugh identifié par Mme Blasey Ford comme étant présent dans la chambre au moment de l’agression présumée au début des années 80.

M. Judge a indiqué vouloir coopérer avec toute agence en charge de l’enquête dans un courrier envoyé à la commission judiciaire du Sénat.

Le témoignage de Christine Blasey Ford devant les sénateurs jeudi a ému une grande partie des Américains, les autres prenant le parti du juge, dans un pays profondément polarisé. Brett Kavanaugh a nié catégoriquement toutes les accusations le visant devant les mêmes sénateurs.

C’est finalement un sénateur républicain clé pour l’issue du vote, Jeff Flake, qui est parvenu à forcer l’ouverture d’une enquête.

Dotés d’une très courte majorité au Sénat, à 51 contre 49, les républicains ne peuvent se permettre de perdre qu’une seule voix. En outre, les élections législatives de mi-mandat en novembre pourrait changer la donne.

– Enjeux cruciaux –

Plus tôt vendredi, la candidature de M. Kavanaugh avait reçu le feu vert de la commission judiciaire, dont les 21 membres ont voté strictement selon leur affiliation politique pour le recommander au vote en séance plénière de la chambre haute du Congrès.

Mais avant de voter « oui », le républicain modéré Jeff Flake avait exigé l’ouverture d’une enquête. « Le pays est en train de se déchirer et nous devons nous assurer d’une procédure en bonne et due forme », a-t-il déclaré.

Les enjeux sont cruciaux. Sous le coup de plusieurs accusations d’agressions sexuelles mais aussi perçu comme profondément ancré à droite, Brett Kavanaugh pourrait faire basculer du côté conservateur la haute cour, dont les juges sont nommés à vie.

Le Sénat a le dernier mot sur les nominations présidentielles à cette instance, arbitre des questions de société les plus épineuses comme le droit à l’avortement, le mariage homosexuel ou la régulation des armes à feu.

Devant la Cour suprême, non loin du Sénat, des dizaines de manifestants anti-Kavanaugh se sont rassemblés vendredi. Parmi eux, la musicienne Joan Baez a prononcé un discours et chanté.

– Sénateurs décisifs –

Un grand suspense demeure sur le vote fibal d’une poignée de sénateurs qui pourraient faire basculer la confirmation de Brett Kavanaugh.

Jeff Flake notamment. Il avait annoncé dès vendredi matin qu’il voterait oui, avant d’être pris à partie dans les couloirs du Sénat par des femmes indignées.

« Vous me dites que mon agression ne compte pas, que ce qui m’est arrivé ne compte pas et que vous laissez les gens qui font ces choses accéder au pouvoir », a lancé l’une d’elles.

Visiblement affecté par ces échanges, et après des conciliabules avec ses collègues démocrates et républicains, il a demandé le report du vote.

Une demande applaudie par deux autres républicaines au vote incertain, Lisa Murkowski et Susan Collins, ainsi qu’un des démocrates qui pourraient au contraire voter en faveur du juge Kavanaugh, Joe Manchin.

« Je suis un conservateur, j’adorerai voir la confirmation du juge Kavanaugh et j’espère qu’on pourra y parvenir », a-t-il expliqué plus tard à des journalistes. « Mais je veux une meilleure procédure ».

Du côté des démocrates, un sénateur élu dans les terres pro-Trump de l’Indiana et jouant sa difficile réélection, Joe Donnelly, a annoncé vendredi qu’il voterait contre Brett Kavanaugh. Face à une équation similaire, Joe Manchin et une autre démocrate, Heidi Heitkamp, réservent encore leur décision. Ils avaient tous trois voté pour le précédent candidat de Donald Trump à la Cour suprême, Neil Gorsuch.

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