Trump a bien demandé au président ukrainien d’enquêter sur Biden, les principaux intéressés démentent

Le Vif

Menacé par une procédure de destitution explosive, Donald Trump a dû publier mercredi le contenu d’une conversation téléphonique dans laquelle il demande à son homologue ukrainien d’enquêter sur son rival Joe Biden. Un échange « accablant » et un comportement de « mafieux » pour les démocrates, mais une crise « montée de toutes pièces », selon le président républicain.

La transcription de cet échange, sur la base de notes, jette une lumière crue sur la relation asymétrique entre Donald Trump et Volodymyr Zelensky, un novice en politique élu en avril à la tête d’un pays très dépendant de l’aide américaine.

Après avoir souligné que son pays « a été très très bon à l’égard de l’Ukraine » sans que cela ait été « forcément réciproque », Donald Trump évoque Joe Biden, parmi les favoris de la course à l’investiture démocrate pour la présidentielle de 2020, et les affaires en Ukraine de son fils Hunter.

« Beaucoup de gens veulent en savoir plus sur le sujet, donc cela serait formidable si vous pouviez vous pencher dessus », dit-il à Volodymyr Zelensky.

Lire ici la retranscription de l’appel téléphonique entre les deux présidents.

Trump affirme ne pas avoir exercé « la moindre pression » sur l’Ukraine

Donald Trump propose à son homologue ukrainien de travailler en coopération avec son avocat Rudy Giuliani, « un homme très respecté » et avec le ministre américain de la Justice Bill Barr et précise que les deux juristes vont se mettre en contact avec lui prochainement.

Dans son échange, M. Trump ne brandit pas de menace concrète et ne propose pas directement de contrepartie. Mais il invite le président ukrainien à la Maison Blanche aussitôt après avoir écouté sa réponse sur Joe Biden.

Mercredi, Donald Trump a donc assuré que cet échange était parfaitement « anodin » et qu’il n’avait exercé « aucune pression » sur M. Zelensky.

Très en colère, il a dénoncé une « crise montée de toutes pièces », se disant victime de « la plus grande chasse aux sorcières de l’histoire américaine ».

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a assuré lui aussi que « personne » n’avait fait pression sur lui.

« Ce fut un bon échange téléphonique, normal », a affirmé M. Zelensky lors d’une rencontre avec M. Trump à New York. « Personne n’a fait pression sur moi », a-t-il ajouté, insistant sur le fait qu’il ne voulait « pas être impliqué dans les élections aux Etats-Unis ».

« Chef mafieux »

Mais les démocrates ont jugé que la transcription reflétait « sans ambiguïté un abus choquant et accablant de la fonction présidentielle pour un gain politique personnel ».

« C’est comme cela qu’un chef mafieux parle: +Qu’avez-vous fait pour nous? Nous en avons tellement fait pour vous mais cela n’est pas très réciproque. J’ai un service à vous demander+ », a relevé l’un de leurs leaders, le représentant Adam Schiff.

A quelques 400 jours du scrutin, les démocrates ont lancé mardi la première étape de la mise en accusation solennelle du président, une procédure rare et explosive qui a peu de chances d’aboutir à sa destitution, mais projette une ombre sur sa campagne de réélection.

Ils le soupçonnent d’avoir gelé une aide de près de 400 millions de dollars destinée à Kiev pour forcer le président ukrainien à l’aider. Dans l’échange entre les deux hommes, M. Trump ne mentionne pas cette aide.

Mercredi après-midi, les deux dirigeants doivent se retrouver à New York et s’exprimer publiquement côte-à-côte.

De leur côté, les élus démocrates de la Chambre des représentants tentent d’organiser l’audition d’un lanceur d’alerte, membre des services de renseignement, à l’origine du scandale. Ils doivent également entendre jeudi le directeur du renseignement national, Joseph Maguire, qui avait refusé de leur transmettre le signalement rédigé par cet agent.

« Positif »

Leur but ? Réunir le maximum d’informations pour étayer leur dossier de mise en accusation (« impeachment » en anglais) avant de passer au vote à la Chambre des représentants. Compte-tenu de la majorité démocrate dans cette enceinte, il est probable que Donald Trump soit mis en accusation, ce qui n’est arrivé qu’à deux de ses prédécesseurs.

Le Sénat, où les républicains sont majoritaires, devra ensuite instruire le « procès » du président et rendre son verdict à une majorité des deux-tiers.

Pour que le milliardaire new-yorkais soit destitué, les démocrates devraient convaincre 20 sénateurs républicains, ce qui paraît hautement improbable à ce stade.

L’un d’eux, le modéré Mitt Romney, a jugé mercredi que l’échange entre MM. Trump et Zelensky était « profondément préoccupant ».

Se montrer trop pugnace pourrait se retourner contre les démocrates. Donald Trump a estimé mardi que la procédure le visant aurait un effet « positif » sur sa campagne.

Pressée depuis des mois de lancer la procédure, la chef des démocrates au Congrès Nancy Pelosi avait résisté par crainte que la bataille politique n’occulte les grands sujets de la campagne, comme l’économie et la santé.

Mais « non, on ne peut pas demander de l’aide à un gouvernement étranger pour gagner une élection, ce n’est pas bien », a-t-elle tweeté mercredi pour justifier son basculement.

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