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Sous les huées, Barroso juge que l’UE « ne peut pas se détourner » de Lampedusa

Le Vif

Arrivé à Lampedusa sous les huées d’habitants en colère, le président de la Commission européenne José Manuel Barroso a assuré mercredi que « l’Europe ne peut pas se détourner » après la tragédie qui a coûté la vie à plus de 300 immigrés.

« L’Europe est avec les habitants de Lampedusa. Le problème de l’un de nos pays, comme l’Italie, doit être perçu comme un problème de toute l’Europe. L’Europe ne peut pas détourner la tête », a déclaré M. Barroso au cours d’une conférence de presse conjointe avec le chef du gouvernement italien Enrico Letta sur la petite île sicilienne.

Pour M. Barroso, « ce genre d’événements ne devrait pas se produire en Europe, il faut des efforts plus poussés, une plus grande coopération entre tous les Etats-membres ».

« Ce drame est un drame européen », a renchéri M. Letta, en annonçant des funérailles nationales pour les victimes du naufrage de jeudi dernier qui a fait entre 300 et 390 morts.

Sur l’île de moins de 6.000 habitants, la tension est à fleur de peau, tant chez les immigrés entassés dans un centre d’accueil surpeuplé -un millier de personnes pour 250 places-, que dans la population.

« Honte! », « assassins! », a crié un petit groupe d’habitants venus attendre la délégation à l’aéroport en brandissant des photos de migrants.

« On vit avec ça depuis 20 ans. Assez de morts! Elles pèsent sur la conscience des politiciens italiens et européens », a crié un manifestant. Les pêcheurs de Lampedusa ont fait résonner les sirènes de leurs navires, pour « faire entendre (leur) malaise ».

Face à la colère, les responsables italiens et européens ont bouleversé leur programme à la dernière minute pour visiter le centre d’accueil. Une visite que la maire de Lampedusa, Giusi Nicolini avait jugé « indispensable », « pour voir de près l’immense tragédie qui se vit sur l’île ».

« Les conditions sont inacceptables, c’est une honte, il y a tant d’enfants. On essaie d’aider mais on n’a pas les moyens », a déclaré aux médias une habitante venue manifester à l’aéroport.

M. Barroso a annoncé le déblocage de 30 millions d’euros pour la rénovation de ces centres, tout en reconnaissant que « bien plus doit être fait ».

La délégation s’est aussi recueillie devant les corps des migrants, en majorité érythréens, repêchés en mer et alignés dans un hangar. « Ce sont des images que je n’oublierai jamais », a dit M. Barroso avec gravité.

A ses côtés, la commissaire chargée des Affaires intérieures, Cecilia Malmström, a répété mercredi que les Etats membres de l’UE allaient mettre en place une vaste opération de « sécurité et de sauvetage » de migrants en Méditerranée.

D’ores et déjà, le vice-directeur de Frontex, l’agence de surveillance des frontières européennes, a annoncé le débloquage de deux millions d’euros supplémentaires pour l’Italie, « en lui donnant la priorité sur d’autres missions », dans une interview à l’agence italienne Ansa.
« Nous devons ouvrir des canaux pour une migration plus régulière », a ajouté la commissaire européenne, citant la création de « visas humanitaires » et la possibilité de réclamer l’asile depuis un pays tiers, hors de l’UE.

Pas question en revanche de revoir l’accord de Dublin, qui impose au pays d’arrivée de traiter les demandes. A cet égard, M. Barroso a rappelé aux Italiens que sur 100.000 demandes enregistrées en 2012, 70% sont traitées dans cinq pays -Allemagne, France, Suède, Royaume uni, Belgique.

Pendant ce temps, les plongeurs italiens ont continué vendredi la récupération des corps. A ce jour, 296 ont été ramenés sur la terre ferme. Seuls 155 des quelque 500 passagers ont pu être sauvés.

Selon le site Fortresse Europe, 6.825 sont morts noyés dans les eaux de Lampedusa depuis 1994, dont 2.352 dans la seule année 2011, le plus souvent dans l’indifférence générale.

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