Rui Nabeiro © EPA

Rui Nabeiro, roi du café portugais

Le Vif

Patron philanthrope de 85 ans, Rui Nabeiro a bâti la 12e fortune du Portugal dans l’industrie du café, qui fait vivre un habitant sur cinq dans sa ville natale de Campo Maior, l’une des rares à échapper à la crise dans cette région déshéritée de l’est du pays.

Malgré son âge, ce self-made man au regard tranquille et au sourire facile est toujours aux commandes de l’entreprise familiale Delta qu’il a fondée en 1961.

La société, que l’octogénaire dirige avec l’aide de ses enfants et de ses petits-enfants, s’est développée à partir d’une petite fabrique de torréfaction de café destiné au marché espagnol.

Sous l’impulsion de M. Nabeiro, qui voyage à travers le monde entier pour s’approvisionner en grains de café vert, surtout dans les anciennes colonies portugaises comme le Brésil, l’Angola ou le Timor oriental, l’entreprise a connu une croissance soutenue à partir du milieu des années 1970.

Delta est aujourd’hui numéro un du café au Portugal avec 31% de parts de marché et un chiffre d’affaires de 350 millions d’euros, dont un quart réalisé à l’étranger dans une quarantaine de pays.

Son empire a suscité la convoitise des plus grandes multinationales de l’industrie agro-alimentaire, telles que Nestlé, Kraft ou Pepsi, qui ont tenté de racheter le groupe à la famille Nabeiro.

Mais le patriarche a refusé toutes leurs offres car l’entreprise « appartient à tous ceux qui y travaillent », dit-il.

« Créer un poste de travail, c’est créer de la richesse pour quelqu’un. Je n’ai jamais pensé à moi, j’ai toujours cherché à servir ceux qui me servent, c’est cette attitude qui m’a donné ce que je possède aujourd’hui », assure à l’AFP le patron du groupe Delta.

Sa fortune estimée à 390 millions d’euros le place au 12e rang des personnes les plus riches du pays, selon le classement établi par le magazine Exame. « C’est un patrimoine mis au service de la communauté », dit l’intéressé.

« Parler de millions est une offense dans un pays où il y a encore tant de pauvreté », ajoute le vieux monsieur d’une voix posée, assis dans un bureau de son usine de torréfaction, mouture et emballage de café, la plus importante de toute la péninsule ibérique.

Une ‘oasis’

Dans les rues de Campo Maior, une bourgade de près de 8.500 habitants proche de la frontière avec l’Espagne, impossible d’ignorer l’omniprésence de M. Nabeiro: une statue à son effigie domine la place centrale depuis 1998 et son nom figure çà et là, sur la façade d’une école publique ou du pavillon sportif municipal.

L’homme d’affaires, un socialiste qui a exercé les fonctions de maire pendant une dizaine d’années, possède outre le groupe Delta le seul hôtel de la ville, une chaîne de supermarchés, une clinique médicale et même un concessionnaire automobile.

La population de Campo Maior ne cache pas son admiration pour cet enfant du pays.

« C’est quelqu’un de bien, qui aime sa ville et qui a aidé beaucoup de gens en leur donnant du travail », témoigne Antonio Susana, un ancien ouvrier du bâtiment de 68 ans dont la femme a travaillé toute sa vie pour Delta, imitée aujourd’hui par leurs deux enfants.

« C’est un homme très affable et très simple », abonde Joao Custodio, un fonctionnaire municipal d’une trentaine d’années, qui décrit sa ville comme une « oasis » dans cette région du pays, déprimée par le chômage et le vieillissement démographique.

Campo Maior, qui affiche un taux de natalité supérieur à la moyenne nationale, est la seule des quinze communes de la région de l’Alto Alentejo à avoir vu sa population augmenter – très légèrement – entre les recensements de 2001 et 2011.

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