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Royaume-Uni: les conservateurs à l’offensive sur le Brexit lors de leur congrès

Le Vif

Brexit, en avant toute! Les conservateurs britanniques se réunissent dès dimanche à Manchester (nord-ouest) pour leur grand-messe annuelle, une tribune en or pour le Premier ministre Boris Johnson en précampagne électorale et sa promesse d’un Brexit à tout-va, en plein chaos politique au Royaume-Uni.

A un mois de la sortie de l’UE, « le Parti conservateur devrait afficher une position agressive et unie sur le Brexit » lors de ses quatre jours de congrès, résume auprès de l’AFP Constantine Fraser, analyste au cabinet d’études TS Lombard.

Plébiscité par la base, Boris Johnson s’est hissé au pouvoir fin juillet en se présentant comme le sauveur du Brexit. Il s’est engagé à le mettre en oeuvre le 31 octobre, même sans accord de divorce avec l’UE susceptible d’atténuer le choc pour l’économie britannique.

Le chef de gouvernement n’en démord pas, même si sa stratégie a jusqu’ici été systématiquement mise en échec par le Parlement. Il a engagé une guerre ouverte avec les députés, qu’il oppose au « peuple » dont il se veut le défenseur, n’hésitant pas à recourir à une rhétorique souvent provocatrice.

« Les députés de l’opposition ne veulent pas s’effacer et laisser le peuple se prononcer », a-t-il lancé récemment, les accusant de vouloir faire fi du référendum de 2016 ayant acté le Brexit à 52%.

« Exacerber la confrontation »

Sa politique de la terre brûlée a jusqu’ici eu un effet boomerang.

Boris Johnson annonce vouloir suspendre le Parlement? Les députés votent dans l’urgence une loi l’obligeant à demander à Bruxelles un report du Brexit en cas de « no deal » — ce qu’il exclut, les accusant de « reddition ». Ils obtiennent ensuite en justice de pouvoir siéger à nouveau.

Il éjecte du Parti conservateur 21 députés rebelles, quitte à saboter sa propre majorité, puis sollicite des élections législatives anticipées pour avoir les coudées plus franches? Les députés s’y opposent, préférant tenir un scrutin une fois l’éventualité d’un « no deal » effectivement écartée.

Autre épine dans le pied, le risque d’ouverture d’une enquête pénale contre lui après la révélation des ses liens avec une femme d’affaires américaine ayant pu bénéficier de fonds publics lorsqu’il était maire de Londres.

Boris Johnson « a assis sa crédibilité sur une sortie de l’UE le 31 octobre, et il est très difficile de voir comment il pourra faire. Sa réponse sera donc de se battre (…) et d’exacerber la confrontation », prédit Constantine Fraser.

« Ce qu’il essaie de faire, c’est de maximiser le soutien des électeurs soutenant le +Leave+ (départ de l’UE) », indique à l’AFP Chris Curtis, directeur de la recherche politique à l’institut YouGov.

Jusqu’à présent, les sondages d’opinion valident cette stratégie. Depuis plusieurs semaines, les conservateurs devancent d’une dizaines de points le Labour, premier parti d’opposition.

« Puritanisme idéologique »

Symbole du bras de fer politique, le dirigeant devrait snober les traditionnelles questions au Premier ministre du mercredi à la Chambre des communes pour prononcer à la place son discours de clôture. Un pied de nez aux députés qui ont refusé d’accorder aux conservateurs une courte pause pour leur permettre d’assister au congrès à temps plein, comme le veut l’usage.

« Ce sera l’occasion de cimenter le début d’une campagne électorale » qu’il avait déjà amorcée dès sa prise de fonction, à grands coups d’annonces d’investissements publics dans l’éducation, la police et les infrastructures, explique à l’AFP Oliver Patel, de l’University College London.

Son approche belliqueuse sur le Brexit ne risque-t-elle pas d’aliéner les plus modérés? Plusieurs d’entre eux ne se rendront pas au congrès, comme l’ex-ministre des Finances Philip Hammond. Il a regretté que le parti tory, duquel il a été expulsé, soit désormais dominé par un « puritanisme idéologique ne tolérant aucune différence d’opinion », samedi dans le journal The Times.

Mais la plupart ferment les yeux, tant que la stratégie marche. « Certains ne sont sûrement pas à l’aise avec ce qui se passe, mais rester au pouvoir est une priorité absolue », souligne Oliver Patel.

Improbable, dans ces conditions, que Boris Johnson mette de l’eau dans son vin. Pour son conseiller spécial et cerveau de la victoire du Leave en 2016, Dominic Cummings, le maelström actuel sur le Brexit est une « promenade de santé » par rapport à la campagne du référendum.

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