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Route des Balkans: l’itinéraire bis passe par la Bosnie

Le Vif

La Bosnie est confrontée depuis quelques mois au passage de centaines de migrants, étape sur une nouvelle route des Balkans qui inquiète ce pays pauvre à l’approche du printemps.

« Nous n’avons pas de capacités pour accepter des milliers de réfugiés (…) même s’ils ne souhaitent pas rester en Bosnie », a récemment prévenu le Premier ministre Denis Zvizdic.

Stéphane Moissaing, chef de mission pour Médecins sans frontières (MSF) dans les Balkans, écarte « le risque d’avoir une crise de réfugiés comme en 2015 ». Mais les autorités bosniennes devraient « gérer (cette situation) d’une façon humanitaire, avant que ça ne devienne une vraie crise humanitaire », dit-il.

Jusqu’à récemment, la Bosnie et ses montagnes étaient évitées par ces voyageurs d’Afrique du nord, du Proche-Orient ou d’Asie, qui malgré la fermeture des frontières de l’Union européenne en mars 2016, continuaient de passer par les Balkans.

La Serbie voisine était l’étape principale avant de tenter de déjouer la vigilance des polices croate ou hongroise pour entrer dans l’UE.

– Trafiquants –

Depuis quelques mois, un itinéraire bis se dessine depuis la Grèce, via l’Albanie, le Monténégro et la Bosnie. Une route qui, s’inquiète une source diplomatique occidentale, recoupe celle empruntée par des trafics criminels plus classiques, d’armes ou de drogue, suggérant que des réseaux organisés de trafic d’êtres humains soient à l’oeuvre.

Parti il y a un mois d’Hassaké (nord-est de la Syrie), Ahmed Wessam, 19 ans, fait une pause à Sarajevo, avec le groupe qui l’accompagne dont plusieurs enfants de sa famille. Ils sont installés dans un logement proposé par des bénévoles.

Pour arriver en Bosnie, il a payé plusieurs passeurs: « Mille dollars pour passer de la Turquie en Grèce, mille euros pour aller de la Grèce en Albanie et ainsi de suite. »

Selon les autorités bosniennes, 700 migrants sont illégalement entrés dans le pays depuis le 1er janvier, et près de 800 ont été interceptés à la frontière. La plupart sont syriens, pakistanais, libyens ou afghans.

Avec la fin de l’hiver, le flux pourrait grossir, redoutent les autorités. Or les capacités d’accueil se résument pour le moment à un centre pour demandeurs d’asile, à 40 km de Sarajevo, qui peut recevoir 154 personnes.

– L’aide de bénévoles –

La situation « se complique », a récemment reconnu le ministre bosnien de la Sécurité, Dragan Mektic, relevant qu’il y avait actuellement « entre la Grèce et la Bosnie entre 45.000 et 50.000 migrants », dont un grand nombre pourrait, dit-il, tenter leur chance par la Bosnie.

La frontière avec la Croatie, pays membre de l’UE, est longue de mille kilomètres. Et Sarajevo ne dispose que de 2.000 policiers des frontières.

Selon Nidzara Ahmetasevic, une bénévole, le nombre de migrants dans le pays « est au moins le double » de ce qu’annoncent les chiffres officiels.

« Nous sommes en contact avec plus de 300 personnes. On a trouvé une solution (de logement) pour une cinquantaine, mais on pourrait remplir encore deux maisons de cette taille », explique-t-elle.

Initialement destinée à devenir une auberge dans la banlieue de Sarajevo, la grande bâtisse où ont été installés Ahmed Wessam et ses proches dispose de chambres individuelles équipées de toilettes. Elle a été mise à disposition par un Bosnien vivant à l’étranger.

Samira Samadi, 35 ans, qui a quitté début 2017 Ispahan (centre de l’Iran) avec son mari, profite du passage d’un médecin du MSF pour vérifier que sa grossesse se passe bien.

« Je voudrais aller en Allemagne, mais (…) nous ne pouvons pas poursuivre. On attendra peut-être ici la naissance de l’enfant », prévue dans six mois, dit Anoush Orak. Ils ont essayé une fois de passer illégalement en Croatie. Mais la neige et la forêt les ont découragés.

Ahmed Wessam partira dans « une semaine, dix jours ». « Je ne sais pas comment on franchira la frontière mais on va tenter et retenter. On en a franchies déjà pas mal… On connaît », dit-il.

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