La Suédoise Zaida Catalan et l'Américain Michael Sharp © AFP

RDC : Ces deux experts de l’ONU assassinés

Le gouvernement congolais a annoncé que la justice militaire enquêtait sur la disparition de deux experts de l’ONU dont les corps ont été découverts dans la région des Kasaï, là où sévit une crise complexe. Ces derniers viennent d’être rapatriés vers leurs pays respectifs.

L’ONU a annoncé le 5 avril avoir rapatrié dans leurs pays respectifs les corps de deux experts de l’ONU tués dans le centre de la République démocratique du Congo (RDC), théâtre depuis septembre des violences meurtrières entre des rebelles et les forces de sécurité.

L’Américain Michael Sharp et la Suédo-chilienne Zaida Catalan, deux experts missionnés par le secrétaire général de l’ONU pour enquêter sur les violences dans la province du Kasaï central, secouée par la rébellion de Kamwina Nsapu, chef traditionnel tué en août 2016 lors d’une opération militaire, avaient été enlevés en mars.

« Nous avons rapatrié les corps de ces deux collègues dans leurs pays d’origine », a déclaré le représentant spécial adjoint du secrétaire général de l’ONU en RDC, David Gressly, lors d’une conférence de presse à Kinshasa. Il revenait d’une visite à Kananga, chef-lieu du Kasaï central, où les deux corps avaient été gardés.

Lors de son adresse devant le congrès (Assemblée nationale et Sénat réunis), le président congolais Joseph Kabila avait demandé à l’assistance d’observer une minute de silence à la mémoire des toutes les victimes des violences dans le Kasaï, citant également les deux experts de l’ONU. « Nous allons avoir une cérémonie aujourd’hui (5 avril) en mémoire de ces deux collègues », a indiqué pour sa part M. Gressly.

Dans une fosse commune

Les deux experts, l’Américain Michael Sharp et la Suédoise Zaida Catalan, avaient été enlevés le 12 mars en même temps que leurs quatre accompagnateurs congolais dans la province du Kasaï-central, secouée par la rébellion de Kamwina Nsapu, chef traditionnel tué en août 2016 lors d’une opération militaire après s’être révolté contre les autorités de Kinshasa.

Leurs corps seront retrouvés seize jours plus tard dans une fosse commune.

Dans la région du Kasaï, la Mission de l’ONU en RDC (Monusco) ne disposait d’aucune force jusqu’au déploiement récent d’une centaine de Casques bleus à Kananga et dans ses environs.

Le Groupe d’experts onusiens sur la RDC est composé de six personnes nommées chaque année par le secrétaire-général de l’ONU. Institué par la résolution 1533 du Conseil de sécurité de 2004, il fournit chaque année un rapport portant notamment sur les mouvements illicites d’armes sur le territoire congolais, déstabilisé par de nombreux groupes rebelles depuis la fin de la deuxième guerre du Congo (1998-2003).

La Monusco est présente en RDC depuis 1999 et déploie près de 19.000 soldats, policiers et observateurs militaires dans l’est du pays et à Kinshasa. Elle ne disposait d’aucune troupe dans la région du Kasaï jusqu’au déploiement récent d’une centaine de Casques bleus à Kananga et dans ses environs.

Depuis le début de la rébellion Kamwina Nsapu, les violences ont fait au moins 400 morts et des milliers de déplacés au Kasaï. Parmi les dernières victimes en date figurent 39 policiers tombés le 26 mars dernier dans une embuscade et « enterrés par leurs bourreaux dans une fosse commune (sur le) lieu du massacre », selon le colonel Pierre-Rombaut Mwanamputu de la Police nationale congolaise.

« Dès qu’ils ont disparu, les magistrats militaires ont ouvert une enquête qui vient de s’accélérer avec la découverte des corps », a déclaré le porte-parole du gouvernement congolais Lambert Mende.

Michael Sharp et Zaida Catalan « ont perdu leur vie en essayant de comprendre les causes du conflit et de l’insécurité en RDC, afin d’aider à ramener la paix à ce pays », a déclaré le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, dans un communiqué.

« Je fais confiance aux autorités congolaises pour qu’elles conduisent une enquête complète sur cet incident. Les Nations unies mèneront aussi une enquête. En cas d’actes criminels, les Nations unies feront tout leur possible pour assurer que justice soit faite », a-t-il ajouté.

« Leurs corps ont été retrouvés dans une fosse et ont été identifiés de façon formelle par les spécialistes de la Monusco, notamment l’équipe de la police des Nations unies », a expliqué de son côté Charles-Antoine Bambara, directeur de l’information publique de la Monusco, lors d’une conférence de presse à Kinshasa.

Crise complexe dans la région des Kasaï

La rébellion Kamwina Nsapu a été accusée par l’ONU de recruter des enfants et d’avoir commis de nombreuses atrocités. En face, les forces de l’ordre se voient régulièrement reprocher par les Nations unies de faire un usage disproportionné de la force contre des miliciens armés essentiellement de bâtons et de lance-pierres.

« Au moins 1,74 million de personnes sont affectées par la crise complexe qui sévit dans la région des Kasaï – Kasaï, Kasaï central, Kasaï oriental, Lomami et Sankuru – depuis le mois d’août 2016 », a indiqué le bureau de l’ONU aux affaires humanitaires en RDC (Ocha).

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