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Qui était Marie Dedieu, décédée après sa prise d’otage?

Féministe engagée et figure de la vie locale, la sexagénaire française est décédée après son enlèvement au Kenya où elle demeurait depuis une quinzaine d’années.

Son décès a été annoncé ce mercredi. Marie Dedieu, une Française vivant sur l’île kényane de Manda a été enlevée chez elle dans la nuit du 1er octobre. Selon le chef de l’administion de Lamu, ses ravisseurs sont probablement des insurgés islamistes somaliens, les shebab. L’expatriée âgée de 66 ans a ensuite été emmenée en Somalie. Les circonstances de sa mort demeurent floues, même si le Quai d’Orsay évoque un possible manque de médicaments que ses ravisseurs lui auraient fournis, alors qu’elle était gravement malade.

Manda, « son petit paradis »

Marie Dedieu était arrivée il y a une quinzaine d’années dans l’archipel de l’océan Indien, vivant d’abord sur la principale île de Lamu, avant de faire construire une maison il y a sept ans sur celle de Manda, qui lui fait face. Décrite comme une « pionnière » par un diplomate français qui l’avait rencontrée l’an dernier chez elle, la sexagénaire avait élu domicile sur l’île bien avant que celle-ci devienne une destination prisée pour une clientèle « très people et très riche ».

Marie Dedieu avait choisi une maison traditionnelle de style swahili, avec un toit de chaume, largement ouverte sur l’extérieur, et donnant immédiatement sur la mer. C’était « un peu son petit paradis », souligne le même diplomate. Selon ses proches, la Française avait observé avec beaucoup de scepticisme la construction par d’autres ressortissants étrangers, à Lamu et dans ses environs, d’immenses villas, dont le luxe souvent ostentatoire tranche avec la pauvreté de l’immense majorité de la population locale.

Figure de la vie locale

« Manda est un petit paradis. Il y a une centaine d’habitants: des Swahilis, bien sûr, quelques Italiens, des Français qui possèdent une maison sur l’île et les touristes de passage. C’est une communauté minuscule, tout le monde se connaît », raconte le cinéaste Elie Chouraqui qui y a connu Marie Dedieu.

« Tout le monde, à Shela (la plage principale de Lamu), connaît Marie », témoignait un guide local après son enlèvement. Il la décrit comme « très amicale avec les gens ». Selon lui, Marie Dedieu participait notamment aux mariages sur l’île. Selon Abdalla Fadhil, l’ancien maire de Lamu et Manda, elle ne ratait aucun événement de la vie locale, notamment les mariages. Le maire adjoint de Lamu, Ajar Ali, la présentait comme une « femme extraordinaire ».
Marie Dedieu partageait ses jours avec John Lepapa, un Kényan de 39 ans d’origine massaï, qui l’assistait, lorsqu’elle revenait de France, où elle rendait visite à son père âgé, en Lorraine, et disposait d’un appartement, à Paris.

Santé fragile

Un grave accident lui avait fait perdre toute mobilité il y a plusieurs années, la contraignant à se déplacer en fauteuil roulant. La sexagénaire était aussi atteinte d’insuffisance cardiaque et souffrait d’un cancer.

Cela ne l’empêchait pas, levée tôt chaque matin, de se faire conduire sur la plage, d’y faire quotidiennement des étirements et de la gymnastique, de discuter avec des amis dans des cafés, raconte le maire, propriétaire du terrain où Marie Dedieu avait fait bâtir sa maison.

Militante féministe

En France, Marie Dedieu fut une militante engagée dans le mouvement féministe historique des années 70, selon plusieurs publications. Elle était « l’une des proches d’Antoinette Fouque », qui cofonda le Mouvement de libération des femmes (MLF) en 1968, selon l’ouvrage « Les éditions des femmes: histoire des premières années 1972-1979 » (éditions L’Harmattan) de Bibia Pavard. Marie Dedieu était également, directrice de publication du Torchon brûle, le journal du MLF, qui publia six numéros entre 1971 et 1973.
Elle avait aussi fait partie des signataires, en 1971, du « Manifeste des 343 salopes » qui, à la une de l’hebdomaire Le Nouvel Observateur, proclamèrent avoir bravé l’interdit de l’avortement.

CC, avec agences

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