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Que va-t-il se passer suite au référendum suisse ?

Le Vif

Le référendum suisse sur l’immigration plonge dans l’inconnu les relations entre la Confédération helvétique et l’Union européenne. Il pourrait être suivi de conséquences rapides si Berne ne ratifie pas l’extension de ses accords actuels à la Croatie. A moyen terme, les relations bilatérales pourraient être « guillotinées ». Il pourrait aussi coûter 80.000 emplois à la Suisse.

Le rétablissement de quotas pour les étrangers, auxquels les Suisses ont dit ‘oui’ à une très étroite majorité dimanche, constitue une violation claire de l’accord de libre circulation que le pays a conclu avec l’Union en 1999. Bien que le vote n’ait pas d’impact légal immédiat, les événements pourraient s’enchaîner rapidement.

L’adhésion récente de la Croatie à l’UE doit en effet être traduite bientôt dans les relations euro-suisses. Les chefs de la diplomatie européenne doivent justement ratifier cette extension/demain mardi. Côté suisse, le processus est censé être bouclé avant l’été. Faute de mandat démocratique, il est possible que les autorités helvètes renoncent à cette extension. Une telle décision auraient un effet d’entraînement direct sur les relations bilatérales, selon un haut fonctionnaire européen. Les négociations actuelles en vue d’une participation suisse au programme de recherche Horizon 2020, d’un budget de 80 milliards d’euros, ainsi qu’au nouveau programme Erasmus, pourraient être suspendues. A moyen terme, le référendum remet en question de nombreux aspects de le relation bilatérale. Les sept accords conclus en 1999 (libre-circulation, mais aussi agriculture, marchés publics, recherche, transport, etc.) contiennent une clause de « guillotine » qui les rend tous caducs si l’un d’entre eux est dénoncé unilatéralement.

En tout, la Suisse a conclu plus d’une centaine d’accords bilatéraux avec l’Union. Elle n’en cherche pas moins toujours à se ménager un meilleur accès au marché européen, notamment en matière financière et énergétique. L’UE, de son côté, réclame une adaptation du cadre institutionnel. Elle veut notamment que la Suisse reconnaisse automatiquement les changements à la législation communautaire, sous le contrôle de la Commission et de la Cour de Justice. Elle veut par ailleurs que la Suisse accepte de revoir les termes de la fiscalité de l’épargne. Toutes ces discussions pourraient être affectées par le référendum sur la libre circulation. Les dirigeants européens ont unanimement souligné lundi que la balle était dans le camp de Berne. Des premières indications sont attendues dans le courant de la semaine.

Le vote sur l’immigration pourrait coûter 80.000 emplois à la Suisse

Les répercussions économiques du vote suisse en faveur d’une limitation de l’immigration sont encore difficiles à évaluer mais cela crée un climat d’incertitude pour les entreprises, font valoir les économistes du Credit Suisse dans une note publiée lundi, estimant que 80.000 emplois pourraient passer à la trappe.

Dans l’immédiat, il est encore difficile d’établir des estimations précises dans la mesure où les conséquences dépendront à la fois de la réaction de l’Union Européenne (UE), des négociations que mènera le gouvernement suisse pour étendre ses relations bilatérales et du niveau de quota qui sera fixé, font valoir les auteurs.

« Ce qui est clair, toutefois, est que l’acceptation de cette initiative a augmenté l’incertitude économique en Suisse avec effet immédiat », ont-ils jugé. « A notre avis, il n’y a pratiquement aucun doute sur le fait que les sociétés suisses et étrangères qui envisagent des investissements (supplémentaires) en Suisse vont avoir au moins tendance à retarder les décisions, à la fois sur les investissements et les embauches supplémentaires », ont-ils ajouté.

Bien qu’ils ne s’attendent pas à un déclin de l’activité économique, les économistes de Credit Suisse estiment que cette décélération de l’investissement pourrait réduire la production économique de 1,2 milliard, soit 0,3% du produit intérieur brut (PIB), durant les trois années précédant l’instauration de quotas. Ils tablent actuellement sur une croissance de 2% en 2014 pour l’économie suisse.
Selon eux, les effets pourraient être encore plus marqués sur l’emploi, l’incertitude incitant les entreprises à différer les recrutements.

« Nous prévoyons que jusqu’à 80.000 emplois de moins seront créés sur cette période de trois ans », ont-ils quantifié. A long terme, les risques pour la productivité et la croissance économique devraient en principe réduire les pressions sur le franc suisse, selon eux. Les économistes d’UBS, la principale concurrente de Credit Suisse, ont quant à eux maintenu lundi leurs prévisions pour l’économie helvétique, tablant sur une croissance de 2,1% cette année.

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