Alexis Tsipras et Vladimir Poutine © Belga - ALEXANDER ZEMLIANICHENKO

Poutine: la Grèce n’a pas demandé d’aide financière à la Russie

La Grèce, qui peine à s’accorder avec ses créanciers pour le déblocage d’un nouveau soutien financier vital, n’a pas demandé d’aide à la Russie mais pourrait bénéficier de crédits russes pour des projets d’infrastructure, a indiqué mercredi le président russe Vladimir Poutine.

« La Grèce ne nous a pas adressé de demande d’aide financière », a déclaré M. Poutine lors d’une conférence de presse avec le Premier ministre grec Alexis Tsipras. Le président russe a cependant assuré que Moscou pourrait participer à des privatisations en Grèce et y investir dans des projets d’infrastructure, notamment dans le secteur du gaz. Cela « nous permettrait non seulement d’accorder des crédits pour tel ou tel projet mais de résoudre des problèmes de crédit dans un contexte plus large », a-t-il expliqué. « Si nous réalisons tel ou tel projet important qui apporte des revenus à la Grèce, cela signifie que ces revenus pourront être utilisés pour le remboursement des crédits dont nous avons brièvement parlés aujourd’hui », a-t-il ajouté. « Il n’est pas question d’aide mais de coopération, y compris dans le domaine financier, en lien avec de grands projets concrets », a-t-il insisté. M. Poutine a notamment évoqué une participation de la Grèce au projet de gazoduc Turkish Stream entre la Russie et le Turquie, qui pourrait servir de base à des livraisons de gaz russe vers le sud de l’Europe. Mais il a reconnu qu’aucun accord ferme n’avait été conclu.

Un possible assouplissement de l’embargo alimentaire pour la Grèce

« Nous évoquerons cette question en profondeur demain (jeudi) lors d’une rencontre du Premier ministre Dmitri Medvedev avec le Premier ministre grec à laquelle je participerai », a déclaré M. Oulioukaïev, cité par les agences russes.

« Nous avons préparé une série de propositions en rapport avec l’embargo et les avons soumises à la discussion », a-t-il ajouté. La Russie a imposé en août dernier un embargo sur la plupart des produits alimentaires des pays qui la sanctionnent pour son rôle dans la crise ukrainienne, en particulier l’UE dont les agriculteurs sont fortement affectés.

Tsipras appelle à « abandonner le cercle vicieux des sanctions » contre la Russie

« Pour résoudre cette crise profonde (en Ukraine), il faut abandonner le cercle vicieux des sanctions, qui ne contribuent pas à la défense du droit international », a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse commune retransmise à la télévision russe. Selon lui, le respect et la mise en oeuvre des accords de paix de Minsk reste « la clé » de la résolution de ce conflit dans l’Est de l’Ukraine, qui a fait plus de 6.000 morts en un an. M. Tsipras a également déclaré que l’économie grecque avait « grandement souffert » de l’embargo alimentaire décrété par la Russie l’été dernier dans le cadre de sa politique de contre-sanctions. Le Premier ministre grec a en outre rejeté les mises en garde de ses partenaires européens sur sa visite de deux jours à Moscou en pleine crise ukrainienne, qui a provoqué une dégradation des relations entre l’Union européenne et la Russie. « La Grèce est un pays souverain et a le droit inconditionnel de mener une politique internationale multiforme et à utiliser son rôle politique en tant que pays européen, méditerranéen et balkanique », a-t-il lancé. « Il y a une nécessité de revenir au dialogue sur une nouvelle architecture de sécurité (internationale). Et personne ne peut imaginer que la Russie n’y participe pas », a indiqué M. Tsipras, promettant que la Grèce favoriserait la création de « ponts de coopération et de dialogue » entre l’UE et la Russie.

Reynders « préoccupé » par un deal possible entre la Grèce et la Russie concernant l’embargo

Le chef de la diplomatie belge Didier Reynders a jugé mercredi « préoccupante » la possibilité d’un accord entre la Russie et la Grèce sur un éventuel assouplissement de l’embargo imposé par Moscou envers les produits agricoles européens suite à la crise ukrainienne.

Le ministre belge peut concevoir d’éventuels tarifs gaziers avantageux accordés par la Russie à Athènes, voire un soutien financier russe à la république hellène en difficultés. « Ce qui serait plus préoccupant, ce serait de voir la Grèce bénéficier de mesures spéciales au regard du boycott russe » envers les fruits et légumes européens, a commenté M. Reynders un peu avant de s’envoler pour Moscou où il doit rencontrer jeudi son homologue russe Sergeï Lavrov. Le Premier ministre grec Alexis Tsipras sera jeudi encore dans la capitale russe où il effectue actuellement une visite fort suivie par ses homologues européens. Pour M. Reynders, il n’est pas « en soi problématique » que les Grecs cherchent des accords avantageux en matière énergétique ou un soutien financier. Un traitement spécifique au regard de l’embargo russe serait en revanche plus sensible. « Cela signifierait alors qu’un changement serait intervenu dans le positionnement de la Grèce envers la question ukrainienne », fait valoir le vice-Premier ministre belge.

La Commission européenne a tout de même rappelé mardi à Athènes que la politique commerciale était « une compétence exclusive de l’Union européenne ». « Nous attendons des Etats membres (…) qu’ils parlent d’une seule voix à nos partenaires commerciaux, y compris la Russie », a précisé Daniel Rosario, le porte-parole de la Commission en charge des dossiers liés au commerce.

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